Ania Francos

Une équipe de journalistes français réalise une interview de Fidel Castro.
« Votre enfance et votre jeunesse vous avaient-elles préparé à devenir un chef révolutionnaire ?
− Je crois que c'est une question difficile... A mon avis, j'étais un enfant comme tous les enfants... C'est très difficile de considérer quels facteurs vous convertissent en révolutionnaire. Un peu de vocation politique d'abord... Question de caractère aussi... Un caractère un peu rebelle, une tendance naturelle vers la justice, une opposition innée à ce qui vous paraît injuste ou immoral... Tout ça fait partie de la vocation. Mais en fait ni la Révolution ni les révolutionnaires ne dépendent d'eux-mêmes, des individus... Ils dépendent d'un climat. Un climat d'injustice, des conditions réelles qui permettent à la vocation de s'exprimer. Il ne peut pas y avoir de Révolution à contretemps. (Fidel sourit.) Combien de Marat, combien de Danton, combien de Robespierre ont dû naître en France depuis que la France existe et cependant seulement un Marat, un Danton, un Robespierre deviennent révolutionnaires. Il a fallu que la monarchie féodale décadente se trouve sur le point de disparaître et que les conditions de l'établissement d'une société nouvelle se trouvent réunis. C'est alors qu'à eu lieu la Révolution française et que sont apparus les grands révolutionnaires que l'Histoire admire. De même Lénine n'aurait pas été le grand révolutionnaire que l'histoire moderne a connu s'il était né au milieu du XVe siècle. Les facteurs qui déterminent la formation d'un révolutionnaire ne sont pas subjectifs ou personnels, ils sont en grande partie extérieurs à l'individu. »