Dès l'âge de six ans, Colette se montra très particulière. Solitaire et craintive. Elle ne manquait pourtant pas de petites compagnes pour s'amuser. Marie et Guillemette passaient souvent la chercher pour jouer à la marelle ou aux quatre coins, ou fabriquer des poupées de chiffon. Mais quand elles l'appelaient, elle ne répondait pas ou se cachait pour les éviter...Marguerite et Robert s'inquiétèrent vraiment quand ils la virent se priver de nourriture, cacher son pain dans ses poches pour le porter aux mendiants. Elle ne voulut bientôt plus coucher sur son lit de plumes, elle préféra de la paille sur des bardeaux. Elle remplaça sa chemise de nuit par une camisole de grosse toile qui la grattait au sang. (p. 16)
Colette choisit de garder Henri de Baume auprès d'elle, pour être son confesseur et son compagnon dans l'accomplissement de sa mission. Il serait son âme soeur. Elle n'eut de cesse que de retourner en Picardie, établir à Corbie un couvent de pauvres dames. Un couvent de clarisses où elle ne prendrait que les soeurs aptes à vivre selon l'austérité de la règle : clôture perpétuelle, ni biens ni richesses, prières et pauvreté, ni bas ni chaussures. (p. 47)
Benjamin mourut le 8 décembre 1830 et Louis l'apprit par les journaux annonçant des funérailles nationales. Elle en fut profondément bouleversée et choquée. Ainsi Charlotte ne l'avait même pas avertie de l'aggravation de l'état de santé de son frère et de sa fin, elle ne lui avait pas permis de le revoir une dernière fois. Certes, elle savait qu'il allait mal, puisque c'est en litière qu'il s'était mis à la tête du cortège insurrectionnel conduisant à l'Hôtel de Ville le futur Louis-Philippe, mais dans les correspondances qu'ils avaient échangées ensuite, il n'avait jamais laissé supposer qu'il allait plus mal.
Louise se souvint avec tristesse combien dès toute petite, alors qu'il ne voyait en elle qu'une bâtarde, elle l'avait aimé, combien elle avait désiré qu'il la reconnût comme sa soeur et comment ils étaient devenus tellement proches l'un de l'autre à la mort de leur père. Ils s'aimaient et il avait toujours fait tout ce qu'il avait pu pour elle et Léonce dont il avait souhaité être le parrain. En perdant Benjamin, Louis perdait non seulement un frère mais, pour la seconde fois, un père. Sa solitude devenait plus grande encore.