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Citation de Charybde2


L’auteur de science-fiction ne clôt pas le débat d’idées. S’il semble en phase avec les Terrestres de Bruno Latour pour affirmer qu’il n’y a guère à l’heure actuelle de Plan B pour la Terre, il ne fige pas ses personnages. Il ne bloque pas leurs yeux vers le sol et la lithosphère. Point selon moi essentiel : au contraire de James Gray dans Ad Astra, jamais il ne convoque Dieu dans le théâtre de ses réflexions. Même pas son ombre, que l’on perçoit par exemple, bien que discrète, dans les circonvolutions intellectuelles de Bruno Latour. Mieux : par la voix de l’un des procureurs du procès qu’il intente sans le dire dans Aurora aux apôtres furieux de la conquête de l’espace, aux obsédés de la fuite vers un salut factice à court ou moyen terme, Kim Stanley Robinson prend acte de l’existence potentielle de vies indigènes sur des planètes pour nous inatteignables. Il reconnaît même la crédibilité de l’hypothèse qu’il pourrait exister dans le très vaste univers des extraterrestres tels Starman et son double Newton, joué par David Bowie dans L’Homme qui venait d’ailleurs, ou plus probablement comme la créature de la lune Europe de 2010 : Odyssée deux d’Arthur C. Clarke, dont il continue à creuser le parcours intersidéral. Kim Stanley Robinson préserve ainsi une figure de l’altérité radicale, quelque part dans nos étoiles, sans la réduire au statut de divinité. Sa lucidité dans le temps long de l’espèce humaine, d’un pessimisme justifié et légitime d’ici le quatrième millénaire sur le devenir de la Terre comme sur nos perspectives vis-à-vis de l’espace, ouvre des pistes pour nous extirper de la double impasse des imaginaires de l’écologie et de la technologie : d’un côté, elle encourage la révolution « terrestre » qu’un Bruno Latour appelle de ses vœux ; de l’autre, à rebours des analyses de l’anthropologue et philosophe, elle maintient et alimente la possibilité, voire la nécessité d’une écologie « hors limites », c’est-à-dire hors de Gaïa, laissant la porte ouverte à nos futurs – aussi compliquées que risquent d’être les prochaines décennies. Chercheur d’utopies, nourri de sciences humaines autant que du système Terre, Kim Stanley Robinson doute… Et ne veut surtout pas gommer les horizons de nos imaginaires.
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