à jaffa
en bord de la mer gémissante de jaffa
où Jonas de lui-même s’est enfui comme un serpent,
je veux en une heure de détresse me fuir aussi
moi-même – mon ennemi charnel le plus proche –
à tarsis, non en ce lieu, mais vers des mots, des strophes.
je surmonte ma fuite en imagination
au bord de la mer gémissante — alors une vague
étranglée par les larmes qui scintillent une à une
m’avale en une lutte violente, impétueuse.
où suis-je ? quelqu’un entendra-t-il mon cri ?
la vague fend la mer et l’ouvre grande.
je m’engouffre dans son tombeau.
au lieu de fuir loin de moi j’ai fui vers moi.
et ceux dont je suis la bouche, – dernière
incandescence du charbon ardent qui les frappa –
me nourrissent de paroles, de strophes.
/Traduction du yiddish par Rachel Ertel