Le roman débute avec un personnage complètement extérieur à l'histoire : il s'agit de Robert Walton, jeune aventurier qui monte une expédition dans le nord polaire et qui entretient une relation épistolaire avec sa soeur bien-aimée. Lors de cette expédition, il sauve la vie à un certain Victor Frankenstein, avec lequel il se lie d'amitié. C'est au cours de leurs conversations que Victor finit par lui confier sa misérable histoire.
Rien dans la vie de Frankenstein ne laissait présager le drame qui allait le marquer à jamais. Il est élevé dans une famille heureuse, unie et généreuse, qui recueille Elizabeth, la cousine de Victor, aussi douce que belle. Malheureusement, la mère du héros meurt d'une scarlatine mal soignée, et c'est à partir de ce moment qu'il décide de se tourner vers les sciences afin de trouver un moyen de vaincre la mort en créant une espèce nouvelle d'hommes.
Frankenstein va se consacrer corps et âme à ce projet insensé, négligeant sa famille et ses amis, vivant en ermite, complètement obsédé par l'oeuvre de sa vie !
Seulement, juste après avoir insuflé la vie à sa création, Frankenstein est saisi d'horreur et abandonne la créature à son triste sort...
J'ai été agréablement surprise par le début du roman : il s'agit en fait d'un roman par lettre et les récits s'enchâssent les uns dans les autres. Nous avons d'abord le point de vue de Robert Walton, puis celui-ci rapporte à sa soeur la confession de Frankenstein qui donne vers le milieu du roman le point de vue de sa créature au moment de leur rencontre après plusieurs années d'absence, et enfin, à la mort de Frankenstein, Walton est à nouveau le spectateur direct.
Par ce procédé, on a l'impression d'être un témoin privilégié de ces confessions et de pénétrer dans l'intimité des différents intervenants.
Mary Shelley aborde dans son roman divers thèmes qui se complètent ou s'opposent : la science et la religion, la nature, la paternité et le sens des responsabilités, les apparences et les préjugés, la vertu et le vice.
Ce qui m'a frappé de prime abord, c'est l'omniprésence de la nature dans l'ouvrage, comme si elle en était un des personnages principaux.
Mary Shelley nous dépeint longuement et avec lyrisme ces Alpes majestueuses.
Frankenstein y fait de longues balades dans l'espoir d'y puiser du réconfort; sa Créature s'y terre pour échapper à la méchanceté des hommes et y arracher sa subsistance. Cette nature, magnifique, ne fait que souligner la laideur qui accable la Créature et qui est la cause de tous ses maux. C'est également dans ces montagnes que se rencontrent pour la première fois Créateur et Créature après le rejet du premier.
La nature sera également le cadre de leur dernier affrontement, mais cette fois dans un lieu hostile à la vie humaine puisqu'il s'agit des glaces arctiques.
La paternité et le sens des responsabilités : la Créature de Frankenstein n'a reçu aucun nom, et par cette absence de baptême connaît son premier rejet de la communauté des hommes. Frankenstein utilise à maintes reprises le terme de "monstre" pour la désigner. Et il faudra attendre le point de vue de la créature pour comprendre que Frankenstein porte sa part de responsabilité dans les malheurs qui lui adviennent.
En effet, d'une manière totalement incompréhensible, Frankenstein se détourne de sa création au moment même où il atteint son but après des mois et des mois de travail acharné. L'auteure ne nous fournira aucune explication à part que le savant est saisi d'horreur. La créature disparaît dans la nuit et elle ne réapparaîtra que bien plus tard !
Parce que la créature n'est pas conforme à ses voeux, Frankenstein la renie sans aucun scrupule et la condamne à la solitude et à l'errance. Il n'assume à aucun moment l'échec de son expérience ni ne cherche à réparer le mal qu'il cause à cet être inexpérimenté et inconscient des usages humains.
Les apparences et les préjugés : l'auteure nous brosse longuement l'enfance et l'adolescence de Frankenstein en insistant sur la douceur, la beauté et la générosité de son entourage, surtout la beauté d'ailleurs, cette beauté dont la créature sera par contraste cruellement dépourvue.
Et pourtant, en voulant créer une race de surhommes, Frankenstein prend soin de ne prélever sur les morts des charniers que les plus beaux morceaux anatomiques qu'il assemble ensuite dans son laboratoire.
A cause de cette laideur et de cette difformité, la créature ne pourra jamais s'intégrer dans la communauté des hommes.
Le seul qui l'écoute et la réconforte est aveugle mais le monstre est ensuite chassé par les voyants.
Et c'est au nom de ces apparences que Frankenstein renonce finalement à accéder à la demande de sa créature de lui donner une compagne d'infortune car le risque existe que celle-ci ne soit saisie à son tour d'horreur à la vue de son partenaire...
Le vice et la vertu : la créature était toute disposée à la vertu et à la bonté mais c'est la méchanceté des hommes qui détruit sa bienveillance en la jetant dans une vie de crimes et de destruction. Il n'y a pas de juste milieu avec le monstre et c'est ce qui m'a surprise. Car si ses malheurs et l'injustice dont il est victime provoquent notre compassion, son basculement brutal et définitif dans le mal nous interpelle : on a l'impression qu'il réagit comme un enfant capricieux et impatient, qui, incapable de gérer sa frustration, décide de se venger en cassant les jouets de son frère aîné (ce qui nous ramène au thème de la paternité et de l'irresponsabilité du créateur)...
La science et la religion : au début, dans un but louable de progrès, Frankenstein utilise la science pour apporter un bienfait à l'humanité, mais à trop vouloir jouer à l'apprenti sorcier et en se substituant à Dieu, il provoque au contraire des effets néfastes !
Comme le sous-titre l'indique, Frankenstein est comparé à Prométhée qui, dans la mythologie grecque, créa les hommes à partir de la boue et s'attira le courroux de Zeus. Mais cette comparaison s'arrête là, car contrairement à l'illustre Titan, Frankenstein n'apporte jamais à sa création la connaissance dont il aurait pourtant si besoin. L'auto-instruction de la Créature fait d'ailleurs parti des invraisemblances du livre.
En conclusion, une lecture très agréable, riche en thèmes abordés; nos sentiments naviguent entre la compassion et l'indignation, que ce soit à l'encontre de la Créature comme du Créateur dont les destins sont si intimement et si tragiquement liés !
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