L'océan s'est dressé en murailles d'écume
dérobant l'horizon
Sa voix m'est parvenue
Il était là, poitrine luisante d'une pluie furieuse
Les yeux dilatés par l'orage
Ses cheveux noirs ruisselaient sur mes seins
Des avalanches d'eau frappaient nos corps
battaient nos peaux glacées
Il était la terre où j'accosterais
Le pli de mer qui marquerait mon horizon
Dans un envol pesant
Les mouettes ont tournoyé en s'insultant
La mer s'est retirée
Tout son sel collé sur lui
LES MOTS PARFOIS
Les mots parfois ouvrent des chemins ensoleillés
Éclairent les mystères
Trouent l’opacité
Les mots parfois s’assoupissent à mes côtés
Sur le bord de la route
Les mots parfois parlent en dormant
Chuchotent à l’oreille de la terre
Les mots parfois glissent au rythme de mes pas sur le chemin
Les mots parfois
Éblouis par une flaque de soleil
Font silence sur la beauté du monde
Il faudrait aimer la part muette
Préférer les avancées instables
Sur des chemins étroits
Engager des aventures inachevées
Il faudrait montrer du courage
Rompre le cercle des familiarités
Ouvrir l’enveloppe des souvenirs
Il faudrait donner à l’imaginaire toujours davantage
Se nicher dans le mystère
Aller vers lui sans crainte
Il faudrait aspirer au secret
Aimer le disparu, l’anonyme
Il faudrait avancer à pas comptés
Se glisser dans l’absence
Caresser nos fragilités
Demeurer dans l’existence nu
Et reconnaître l’inconnu
Les lits du monde
J’ai vu…
J’ai vu l’insurrection des terres désertes d’Afrique
J’ai traversé les ciels d’orage
Les îles bleues
Les mers chaudes
J’ai craint les profusions verdoyantes des collines d’Asie
J’ai passé des frontières
Franchi des caps
Marché sans répit, insatiable
Ivre d’une quête sans fin
J’ai vu les yeux agrandis des enfants
Les corps amaigris, les pieds calleux
Les blessures noires, les peaux flétries
J’ai bu les eaux saumâtres des longs fleuves paresseux
Emportée par les courants
J’ai nagé dans les eaux claires
J’ai caressé des corps
J’ai dormi dans les lits du monde
Légère est la vie parfois
De grands oiseaux glissent alors dans la plainte du vent
Forment un ballet joyeux
Une danse s'invente
Il existe des lieux bouleversants qui guérissent
et qui sauvent
Des lieux par lesquels se consoler de notre condition
" Je rêve à l'infini
Au sans limite et au sans voix
Au sans couleur
Au sang coulé
Au rire troué
Au silence aveugle de ma peur..."
Toucher l’élémentaire
Retourner au torrent
Poser le pas sur le chemin
Rejoindre la vallée
Boire la rosée
Soyez mon amant
Soyez l’homme fin
Qui glisse sous le drap
Soyez ce corps qui m’emporte,
Une mémoire liquide s’est abattue sur moi
Tout a coulé en vagues
Ressac obsédant du temps