L'antre des livres 2020, dimanche 11 octobre, 10 h 30, table ronde : Aux frontières du réel, le roman fantastique et les méandres de l'esprit
Confronter la façon d'aborder le processus créatif de deux genres littéraires. La littérature s'écrit-elle comme un jeu de rôle?
Avec :Cédric Totée (Elan Sud), aborde des sujets profonds avec l'humour décalé, il explore aussi l'irrationnel, il s'interroge sur le grain de sable qui, parfois, fait tout basculer.
https://elansud.com/boutique/hors-collections/80-comme-le-lait-sur-le-feu-9782911137693.html
Celia Barreyre (Marathon), passionnée de science-fiction old school et de bandes dessinées, aime se décrire comme une conteuse de la magie du quotidien.
https://marathoneditions.fr/produit/flux-nous-sommes-demain/Animée par
Thomas Hintermeier
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Alex leva les mains, à court de mots. Il attendit une intervention de la part des autres, mais rien ne vint.
- C’est bien trop dangereux. Tu veux tous nous embarquer là-dedans, moi en particulier, et tu ne me demandes même pas mon avis ! J’ai qu’une vie, Lili, j’ai pas envie qu’elle se termine au pied d’un putain de mur, dans un putain de centre, avec une putain de balle entre les deux yeux ! J’ai rien dehors, moi ! J’ai pas de famille, personne ne m’attend, j’ai nulle part où aller ! J’ai déjà tout perdu bien avant d’arriver au CETSA. Tout ce que j’ai aujourd’hui est...
Il s’interrompit brusquement et l’observa.
- Tout ce que j’ai est ici.
Lili ne sut quoi répondre. Il n’y avait rien à répondre à cela.
Yann tira sur son bras pour lui faire faire demi-tour.
- On va au gymnase et je t’explique là-bas. On va la jouer discrets. Ces enfoirés font des rondes dans les couloirs. S’ils te trouvent, ils te demandent ton nom, ce que tu fais, d’où tu viens, où tu vas et si tu ne réponds pas ils te font un toucher rectal !
- Yann...
- OK, ils ne le font pas, mais je suis sûr qu’ils le feraient s’ils pouvaient.
- N’importe quoi !
Personne ne savait exactement comment cet intrus avait pu emporter un tiers de l’humanité avec une telle virulence, laissant derrière lui un second tiers malade. Comme Lili. Comme tous ces enfants porteurs sains, jusqu’à ce que la maladie finisse par se manifester à la faveur d’une crise violente et douloureuse. L’espérance de vie des infectés ne dépassait pas les vingt ans en moyenne.
Ce n’était pas tant l’enjeu que la crainte d’échouer. L’enjeu, elle le comprenait, l’analysait très bien, même si elle ne le ressentait pas dans ses tripes. Tout son corps était tendu vers l’accomplissement de chaque étape du plan. Son bon déroulement. C’était ça qui la stressait.
L’épidémie avait amené son lot de misères : les lamentations de ceux qui restaient, les deuils impossibles des proches, les sanglots des orphelins terrorisés... autant de spectacles insoutenables auxquels l’espèce humaine avait dû faire face.
Si la crise était trop forte et que votre cœur était touché, infarctus ! Vos poumons ? Étouffement ! Vos reins ? Insuffisance ! Et ainsi de suite. En fait, vous faisiez une expérience d’autocombustion à l’échelle cellulaire.
Son humeur était aléatoire et la jeune fille avait un penchant particulier pour les changements brutaux. Là, tout de suite, elle rêvait de solitude.
A leur âge, on avait une telle soif de vivre que la mort était une cruelle injustice qui vous rendait dingue en attendant qu’elle se pointe.