Christian Miquel

Les habitudes permettent de se soulager des tâches répétitives, mais elles créent un pilotage automatique dangereux, qui amène à être absent de soi et de sa vie. La première tâche de la pleine conscience est de s’en apercevoir, et de chercher à s’éveiller en débranchant le pilotage automatique.

Il est né probablement 563 ans avant notre ère selon la majorité des historiens actuels ; en avril-mai de l’année 623 selon la tradition theravāda. Il a vu le jour à Kapilavastu dans le Nord de l’Inde, actuellement au Népal. La région est occupée par de petits royaumes proches des cités-états de la Grèce de la même époque, avec des assemblées démocratiques. Dans le canon pāli lui-même, son père n’est pas roi mais un noble du clan Gautama. Il a probablement présidé l’assemblée du petit royaume agricole et démocratique de Sakya, comme gouverneur ou chef régional. Il a dû envoyer son fils faire ses études à la capitale, Savatthi. Celle-ci était reliée aux autres régions de l’Inde, mais aussi à la Perse et le mazdéisme d’où vient la croyance en un diable, Mara, qui viendra tenter le Bouddha, et probablement à la Grèce par le royaume de Gandhara.

Cherchez toujours comment les choses se sont produites, leur émergence : suivez vos sentiments à la trace, repérez leurs flux et leurs intensités, mais aussi ceux des « autres » que vous croisez dans la vie.

C'est aussi la leçon qu'avait enseignée le Bouddha : il ne suffit pas de se dire que le réel est simple et qu'il suffit de le vivre. Pour arriver à cette fin, il faut sans cesse pister les menées du Moi et du désir de figement de l'être, les débusquer inlassablement, en reconstituant la généalogie de tout vécu. Tel était le pratityasamutpada, deuxième pilier complétant l'attention et invitant à décomposer sans cesse, de manière généalogique et critique, tout ce qu'on vit.

Ce que les philosophes ont improprement appelé l'intuition, mot qui substantifie dans les catégories d'une faculté abstraite le simple acte de présence et d'attention aux choses, se déroule à un niveau préconceptuel, et donc en dehors des catégories du langage; plus encore, on pourrait même dire que c'est finalement à cette simple attention aux choses que vise tout langage poétique authentique, qui ne parle au fond que pour mieux laisser éclore le silence de la présence.

Ce qui est beau également dans la neige, c'est la manière dont elle tombe sans discontinuer, pendant des jours entiers, tantôt en gros flocons, tantôt en rafales de givre glacé. Car, à contempler ces chutes qui semblent sans fin, on sent un calme étrange vous envahir. Comme si vous étiez vous-même recouvert, enseveli sous un lourd linceul de sommeil; comme si le temps cessait de s'écouler en vous projetant de manière horizontale vers demain et vers de nouveaux projets, et qu'à la place, cet épais manteau blanc qui coule doucement du ciel comme d'un immense sablier vous intégrait silencieusement dans un temps vertical qui, de toutes parts, vous entoure et vous enserre, en vous abstrayant du temps quotidien, en vous faisant plonger dans un « autre temps » immobile, où il n'y a pas de projet, pas de demain : rien, si ce n'est la blancheur immaculée de ce temps du silence et de l'oubli.

Ce qui est admirable également, c'est la qualité du silence ouaté qui se met soudain à recouvrir une ville et ses bruits habituels. Certes, le simple fait de regarder la neige tomber, sans fin, est déjà en soi une cure de silence, qui vous lave et vous purifie, en faisant oublier les problèmes et les milliers de pensées inutiles qui peuvent vous assaillir.

Bouddha n’est pas un dieu, ne se réclame d’aucun dieu. Les quatre vérités qu’il énonce à Sārnāth après son expérience d’éveil à 35 ans ne sont dites « merveilleuses » ou « nobles », que parce qu’elles permettent de comprendre la souffrance et de s’en libérer de manière concrète, comme par magie. Il donnera ensuite des enseignements oraux jusqu’à 80 ans, retranscrits plus tard par ses disciples.

Dire que le monde est « sans ordre raisonnable » ou encore plus radicalement « sans raisons » n'est pas pour autant chasser la raison du monde; c'est plutôt (...) subordonner la raison au mouvant chaos qui la fait naître, la remettre à sa place, en lui ôtant ses illusions et prétentions à représenter la norme régulatrice de la vie... Or, quoi de plus rationnel qu'une telle perspective ?

Il s'agit donc de se promener dans le monde en se rendant sensible à tout ce qui, sans cesse, éclôt, dans l'unicité d'une forme qui, à peine esquissée, déjà se défait, s'évanouit pour laisser place à une nouvelle configuration qui prend naissance.

Le saviez-vous ?

Selon les études en neurosciences, 90 % de nos actes quotidiens se déroulent à notre insu, sans être vraiment présents, le cerveau se mettant en pilotage automatique.

Il ne reste plus, alors, qu'à suivre ce conseil qui clôturait le Tractatus logico-philosophicus de Wittgenstein : « Ce dont on ne peut parler, il faut le taire.

Le saviez-vous ?

74 % des accidents mortels ont lieu lors des trajets courts ou quotidiens, l’habitude et le pilotage automatique diminuant notre vigilance.