Je sais que c’est difficile à entendre mais il n’y a pas de mère s’il n’y a plus d’enfant. C’est l’enfant qui signifie la mère. La mère dont les enfants ont disparu est chassée du signifiant. Elle se transforme en spectre de ce qu’elle a été. Elle est alors appelée “ mère de disparu ”, dans un langage qui la nomme en même temps qu’il la dépouille. Un langage qui efface ce qu’elle a été, la nomme pour ce qu’elle n’est plus. C’est pourquoi je parle de la cruauté que ces salauds ont incrusté jusque dans le langage, qui nous empêche de penser
Pour aller à contre-courant de l’oubli, il nous faut retrouver les histoires singulières des disparus, faire apparaître leurs noms, tout reconstituer, fragment après fragment.
... pourtant délaisser l’eau, scintillement des feuillages, les éclats de midi et déjà, retrouver les dalles sèches, lissées par le feu estival. En un temps se vêtir, c’est bientôt l’ombre apaisante des marronniers, l’odeur piquante des buis, sentinelles du bonheur alors que l’horizon est embrumé de chaleur jusqu’à la chaîne des Pyrénées. J’aime le silence préservé de la salle blanche, hiératique, imperméable aux vives saisons.