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Citation de jvermeer


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Brassens est sorti d’entre les rideaux comme s’il n’était pas la vedette de la soirée, mais un machiniste égaré, avec ses énormes moustaches de Turc, ses cheveux en broussaille et des chaussures lamentables, comme celles que devait mettre son père pour aller poser des briques. C’était un ours tendre, avec les yeux les plus tristes que j’aie jamais vus, et un instinct poétique que rien n’arrêtait. « La seule chose que je n’aime pas, ce sont ses gros mots », disait sa mère. Il était capable de tout dire, et beaucoup plus qu’il n’était permis, mais il le disait avec une force lyrique qui entraînait tout jusqu’au-delà du bien et du mal. Pendant cette soirée à l’Olympia, il a chanté comme jamais, torturé par sa peur congénitale du spectacle public, et il était impossible de savoir si nous pleurions à cause de la beauté de ses chansons, ou de la pitié que suscitait en nous la solitude de cet homme fait pour un autre monde et un autre temps. C’était comme écouter François Villon en personne, ou un Rabelais perdu et féroce.

Gabriel Garcia Marquez « Georges Brassens » 11 novembre 1981

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