Une exploration personnelle et incarnée du féminisme, de la sexualité et du pouvoir par celle que l'on surnomme "Emrata", mannequin star aux 28 millions de followers sur Instagram.
Emily Ratajkowski est une mannequin et actrice acclamée, une progressiste politiquement engagée, une entrepreneure à succès, un phénomène mondial grâce aux médias de tous les pays et aux réseaux sociaux, et maintenant, une écrivaine. Devenue mondialement célèbre à l'âge de vingt et un ans, elle a suscité à la fois des éloges et de la fureur, avec l'affichage provocateur de son corps comme une déclaration d'autonomisation féministe. My Body est un ensemble de textes qui relatent des expériences vécues et des souvenirs dans lesquels Emily Ratajkowski décrit la marchandisation de son corps, et de celui des femmes en général. À travers le récit de moments précis de sa vie, elle étudie la fétichisation culturelle de la beauté des femmes et des jeunes filles l'obsession doublée de mépris pour la sexualité féminine, la dynamique perverse des industries de la mode et du cinéma et la zone grise entre le consentement et la violence.
Subtil, déterminé et incisif, My Body marque les débuts d'un écrivain clairvoyant débordant de courage et d'intelligence.
Retrouvez les informations à propos du livre "My Body" d'Emily Ratajkowski, traduit par Laurence Kiefé sur notre site : https://bit.ly/3qP1P5m
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J'avais dix-neuf ans. J'adorais conduire le long de la côte, les vitres baissées, en écoutant de la musique.
J'adorais l'odeur de ma peau quand je m'étais roulée dans le sable après avoir bu trop de sangria, sur la plage avec mes copains. Je mourais d'impatience de rencontrer le genre de gens cool et intelligents que je croyais pouvoir le trouvais à L.A. si je gagnais suffisamment d' argent pour m'y installer; excitée par le monde des adultes, et où j'allais pouvoir trouver ma place et qu'est-ce que j'allais pouvoir faire ? Tu t'en souviens, toi, à quoi ça ressemble d'avoir dix-neuf ans ?
Quand la journée était bonne, je traitais les gens de sexistes s'ils condamnaient une femme qui tirait profit de son anatomie. Quand la journée était mauvaise, je me détestais et je détestais mon corps, toutes les décisions que j'avais prises au cours de mon existence n'étaient que des erreurs flagrantes.
Surtout, à vrai dire, je savais que j'étais une personne complète et complexe, qui avait des réflexions à mener, des idées à exprimer, des choses à accomplir. J'avais si désespérément envie de leur prouver à tous qu'ils avaient tort. Le problème, c'était que je n'en avais pas encore eu l'occasion.
Quand j'avais vingt ans, il ne me venait pas à l'esprit que les femmes qui tiraient leur force de leur beauté dépendaient des hommes, car sans le désir des hommes, elles auraient toujours ignoré cette force. Ces hommes, c'était bel et bien eux qui avaient la maîtrise de la situation et non pas les femmes que le monde flattait servilement. Accepter la réalité de la dynamique en jeu, cela aurait signifié que je reconnaissais à quel point mon pouvoir était limité - à quel point le pouvoir de n'importe quelle femme l'est quand elle survit dans le monde, même si elle réussit, comme un objet à regarder.
Maintenant, je suis en colère, pas seulement par rapport à moi mais pour la « fille en Russie » et toutes les jeunes femmes et les filles qui te voient comme un dragon devant lequel elles font la queue pour être jugées comme baisables ou pas.
Je veux dire à ces filles que je ne suis pas sûre que ça vaille le coup - pas plus l'argent que l'attention obtenue.
Je mentirais si je disais que la célébrité ne va pas de pair avec des cadeaux : qui prendrait la peine de lire ce que j'écris si je n'avais pas su impressionner des hommes comme toi?
Je suis prête à révéler toutes mes erreurs et mes contra-dictions, pour toutes les femmes qui ne peuvent pas en faire autant, pour toutes les femmes qu'on a traitées de muses sans même connaître leur nom, dont le silence a toujours été interprété comme un consentement. Pour en arriver là où je suis, c'est sur leurs épaules que je suis montée.
Les coiffeurs sur le plateau de Gone Girl m'ont prévenue qu'il était temps d'arrêter les shootings toute nue maintenant que je n'étais plus seulement une muse et un mannequin - mais leurs conseils étaient déroutants : n'avais-je pas décroché ce rôle, du moins en partie, parce que je m'étais déshabillée pour des hommes tels que toi, Steve ?
Les hommes ne remarquent jamais à quel point les femmes sont calculatrices. Ils pensent que les choses se produisent "pour je ne sais quelle drôle de raison" alors que les femmes se mettent à entonner des chansons, à faire le poirier et à se lancer dans des danses élaborées pour que, justement, ces choses arrivent.
Je savais ce qui me restait à faire ; des mecs comme toi, j'ai dû en-impressionner toute ma vie, et me montrer heureuse du moindre signe d'attention de leur part. J'étais encore une ado mais savoir comment m'y prendre pour me faire remarquer par des gens dans ta situation, c'était déja une seconde nature chez moi.
D'une certaine manière, cette surexposition de mon corps m'a toujours paru l'option la plus sûre. Se mettre de soi-même à poil, ainsi personne d'autre ne pourra le faire à votre place ; ne rien cacher, afin que personne ne puisse utiliser vos secrets pour vous faire du mal.
Je me demande combien de femmes tu as sous-estimées dans ta vie, passées en pertes et profits parce que tu considérais qu'elles n'avaient rien à offrir au-delà de leur apparence physique.