La tombe en tant que monument, même modeste, est ainsi l'objet transitionnel qui matérialise la séparation entre les vivants avec un défunt [...]. Sans ritualisation, sans socialisation, la séparation peut se révéler problématique [...]. [En arrivant ] à aboutir à l'agrégation du défunt à un autre monde, les endeuillés peuvent alors en faire non pas un non-être mais un non-existant [...] il doit y avoir des tombes parce qu'il faut transformer les morts en défunts.
La fouille de la partie supérieure du tertre révéla des restes inhabituels et à l'ouverture du coffre de la jeune fille ligotée, aux mains cousues dans les vêtements, magnifiquement parée, nous intrigua. S'agissait-il d'une oudagane ? L'une de ces femmes chamanes de Sibérie semblable à celle qu'avait rencontrée le voyageur G.-J. Gmelin près du lac Baïkal entre 1733 et 1743 et qui, à dix-huit ans, était considérée comme supérieure à n'importe quel homme chaman (Gmelin, 1752).
[il faut souligner] l'importance de la société pour prendre en charge les corps des décédés, les proches ne pouvant parfois pas y arriver seuls, en raison d'un abattement psychique trop important.
[Les rituels des morts] collectifs et festifs [...] sont faits par les vivants et pour les vivants dont ils renforcent les liens et la mémoire intergénérationnelle entretenue par le contact avec les morts, ils affirment la structuration des sociétés [...]. [Mais] la structuration [des sociétés] est [...] différente et le traitement des morts renvoie à autant de structures de base du monde des vivants : le clan, la famille, le village, voire la nation.
[...] dans la plupart des sociétés, ceux qui assistent au décès ou ceux qui découvrent le corps ferment les yeux du mort s'ils sont ouverts [...]. Cette fermeture des yeux est une marque de respect pour le corps et celui qui le réalise, en reconnaissant implicitement la mort, marque le début du deuil pour les survivants [...] fermer les yeux à un cadavre [...] c'est déjà le resocialiser et lui donner l'aspect d'un dormeur.
[...] il existait auparavant trois catégories de "malemort", les morts avant l'heure, les disparus, et les insuffisamment pleurés et honorés, qui soulignent toutes l'inaccompli.
Le fait de porter le deuil [...] donne une composante sociale au sentiment de tristesse [...] et permet de l'encadrer.