LE SECRET DE VAN GOGH - ÉRIC MERCIER
J'avais misé sur le tatouage pour nous mettre sur la piste. Les tatoueurs sont comme les peintres, ils sont parfois identifiables à leur style.
C'est énorme, je te dis. A l'époque, l'estimation du tableau était supérieure à cent millions d'euros. Davantage encore si le tableau obtenait l'autorisation de sortie du territoire. Tu vois, on tue pour beaucoup moins
— Vous en pensez quoi ?
— Ce serait plus simple si les victimes étaient de belles personnes et les assassins des salauds, non ?
Toutefois, pour aimer autrui faut-il être encore être capable de s'aimer un tant soit peu. Aimer c'est fatiguant, il n'en n'avez plus la force.
Engoncée dans un tailleur rose bonbon, de ceux que portait la Dame de fer dans les années quatre-vingt, la bourgeoise nous dévisage tels des pestiférés de Jaffa sortis de la toile du baron Gros. Après avoir vérifié par deux fois ma carte, elle nous assaille de questions de sa bouche en cul-de-poule.
Mais les bonnes fées sont trop sollicitées pour veiller au grain constamment. Ou bien elles se lassent, et les contes ne se terminent pas toujours bien, à plus forte raison quand ils ne sont pas écrit pour les enfants.
Quitte à vous décevoir, commandant, il y a autant de façons d’authentifier un tableau qu’il y a de peintres. Il n’y a pas de tests scientifiques qui permettent à coup sûr de prouver l’authenticité d’une œuvre et notre profession n’est pas réglementée, donc toute personne est juridiquement en capacité d’établir un certificat pour n’importe quel peintre. Ce qui compte, c’est la notoriété et la crédibilité de l’expert, sa connaissance parfaite de l’œuvre du peintre. En ce qui me concerne, je fais autorité sur trois ou quatre artistes.
En l'absence de tickets- restaurant, de billets de train ou d'avion gratuits, de treizième mois er de Stock-options il faut bien bénéficier du quelques avantages à bosser dans la police.
- Alors quoi ce sont des oeuvres originales ?
-Ce n’est pas si simple. Les faussaires achètent de vieilles toiles identiques à celles qu’utilisait le peintre copié. Puis ils les poncent ou les recouvrent pendant plusieurs jours d’un torchon imbibé de solvant, le temps nécessaire pour ramollir la couche picturale et l’enlever sans difficultés. Dans les deux cas, ils disposent d’une toile ancienne enduite de sa préparation d ‘origine.
Le quartier est désert. Trop tôt pour les promeneurs effarouchés par les ragasses de la nuit. Chante la grive, la pluie arrive. D’épais nuages de ce gris caractéristique du zinc des toitures parisiennes plombent l’atmosphère. Le silence qui s’est abattu sur le quartier nous interdit la moindre erreur. Un bruit suspect ou même le craquement le plus anodin donneraient l’alerte. Les merles ont déserté les broussailles ou demeurent becs clos, comme si ils anticipaient un drame. Je donne mes instructions.