Fanely Scott

Je suis persuadée que rien n'est coïncidence. Les choix opérés nous mènent toujours quelque part, dans un lieu, vers une personne. Et parfois ces choix nous poussent à changer profondément.

Chapitre 1 :
«…
— J’appréhende notre retour. Est-ce que tu sais pourquoi le groupe nous a demandé de rentrer ?
Hugo hausse les épaules mais ne semble pas le moins du monde inquiet. Il fait partie des anars depuis tellement longtemps que rien ne paraît le perturber.
— Je ne sais pas mais crois-moi, c’est inutile de t’en faire à ce sujet. On le découvrira très vite et quoi que ça puisse être, tu ne cours aucun danger. Bébé, je ne te demanderai pas de rentrer autrement.
— Tu sais que c’est risqué. Tout ça, le groupe, les missions. Je ne veux pas qu’il t’arrive quelque chose.
Mon mari rit légèrement avant de relever la tête et de se rapprocher de moi.
— C’est donc ça ? Tu as peur pour moi ?
Je hoche la tête, interdite et agacée qu’il ne prenne pas ma révélation au sérieux. Il se renfrogne soudain, comprenant que je n’ai guère envie de plaisanter.
— Kris, combien de fois devrais-je te le répéter ? Certes, je ne suis pas invincible mais j’ai suffisamment d’expérience pour anticiper les dangers. C’est probablement impressionnant pour toi mais je connais ce milieu depuis pratiquement le début. C’est devenu une forme de routine.
— Pourtant les missions te procurent toujours autant d’adrénaline. Permets-moi de douter de cette routine !
Il sourit. Rien n’entachera sa bonne humeur aujourd’hui.
— C’est vrai. J’aime ce que je fais. Et prendre des risques fait partie de cette vie que j’ai choisi. Est-ce que tu as – il marque une pause, hésitant sur le choix de ses mots – des regrets ?
— Qu’est-ce que tu veux dire ?
— À propos de qui je suis ? De ce que je fais ?
Je fronce les sourcils et plonge dans ses yeux noirs, perplexe.»

Extrait :

Chapitre 1 :
«…
À présent, je comprends pourquoi le visage de Sam me semblait familier la première fois que j’ai rencontré les anars. Sa photo avait fait la une des journaux pendant quelque temps. Sauf qu’il n’avait jamais été fait mention de viol.
— Et aujourd’hui, nous sommes trente-huit, avec toi Kris. Bienvenue dans le groupe. Ton épreuve a été un succès. Au fait, pourquoi la bijouterie de Karl Jacob ?
Prise au dépourvu, je tente de justifier mon choix sans bredouiller.
— Son propriétaire a suscité un véritable tollé dans la presse ces derniers temps, avant que tout soit balayé par un démenti officiel. Je trouve cette histoire suspecte. Et entre nous, cette bague, ce n’est qu’une goutte d’eau – ou plutôt de sang – dans son portefeuille.
— Belle initiative ! approuve KJ. Bien. Peut-être avons-nous déjà trouvé notre prochaine cible.
Je me raidis à ces mots. J’ai placé cet homme peu scrupuleux en tête de liste en visant sa bijouterie. KJ ne paraît pas s’apercevoir de mon inquiétude et poursuit sereinement.
...»

Chapitre 6 :
«… Je tourne les pages et comprends. Des passages du livre sont soulignée d’un trait net. Je les parcours un à un.
Page 179 :
«Je t’en prie. Cesse de me fuir. Tu me glisse entre le doigts chaque fois que nos destins se croisent.»
Je reconnais les parles de l’amant tourmenté et tourne les pages, empressée.
Page 182 :
«Je ne suis pas celui que l’on t’a dépeint. Je en suis ni mauvais ni bon. Je suis entier.»
Page 183 :
«Ne laisse personne juger à ta place l’homme que je suis.»
Page 207 :
« Les gens m’ont trop souvent dépeint comme un malfrat, si bien que je ne puis plus me défaire de cette image.»
Page 209 :
«Je perçois cette peur dans ton regard et pourtant, malgré tout, tu m’offrais tes sourires. Ta douceur. Tes caresses.»
Page 219 :
«Tes colères sot devenues si puissantes à mon égard. T’ont-ils déjà mis en garde?»
Page 228 :
«S’il te plaît, offre-moi le bénéfice du doute.»
Les pages suivantes sont restés intactes...»

Chapitre 2 :

Krista

« …Il secoue la tête et s’approche d’un pas lent avant d’entourer mes poignets de ses larges mains.

— Je t’aime, Kris. Je veux construire ma vie avec toi, avoir des projets.

Je reste bouche bée un court instant. Tous ces mots que j’ai rêvé d’entendre, inconsciemment, il les prononce enfin, mais dans un contexte totalement délirant. Cette perspective est hors d’atteinte. C’est au-dessus des lois du clan.

— C’est à cause de la grossesse de Lena ?

— En fait, non. Ça fait un moment que j’y pense. Ne me dis pas que ça ne t’a jamais traversé l’esprit.

— Si, mais je me suis résignée. C’est contraire au règlement.

— Et tu crois que je ne le sais pas ? Tu n’as que ce mot à la bouche, aujourd’hui !

— Ce n’est pas la priorité. Réglons un problème après l’autre.

— Quel problème ?

— Comment espères-tu faire entendre raison à Keith ?


— Ce sera bien la plus grande difficulté...»

Chapitre 1 :

Hugo

« …Elle est à mille lieues d’ici et, un instant, j’ai peur que le choc soit trop fort et trop lourd à porter sur ses frêles épaules. Était-ce le bon moment pour le lui révéler ? Bordel… elle vient d’apprendre que son frère était toujours en vie, sa mère est morte et moi je lui lâche l’info comme une bombe.

— Je suis désolé, Kris… ça va aller. Je suis là, avec toi.

— Tu crois que ça ira ? finit-elle par murmurer après un long silence.

Je ne reconnais pas sa voix, lointaine et à peine audible. Je ne suis pas certain que sa question en soit vraiment une. Ses tremblements commencent à s’estomper et quand je me redresse elle lève le menton pour planter ses yeux dans les miens. Elle est abattue, secouée ou lasse. Je n’arrive pas à le déterminer. Ce n’était visiblement pas le bon timing, mais je suis incapable de garder un tel secret pour ma femme. J’ai besoin d’elle et de son soutien...»

Mes premiers romans ont été publiés il y a presque six ans. Après des débuts difficiles, mes sorties ont conquis un lectorat de plus en plus important, grâce au service marketing très compétent développé par Mélinda. J’ai enchaîné les salons littéraires, les séances de dédicaces et vu mes ventes décoller. Puis j’ai quitté mon emploi d’assistante dentaire en province pour écrire à temps plein et déménagé à Paris pour me rapprocher de ma maison d’édition.
Depuis, mon acharnement me le rend au centuple. Je suis fière du chemin parcouru et à trente-quatre ans, je n’ai jamais été aussi épanouie qu’aujourd’hui. Néanmoins, je n’oublie pas mes origines, ni le travail fourni pour y parvenir, consciente que tout pourrait s’arrêter du jour au lendemain.

Mon cœur est en train d’imploser à l’intérieur de ma poitrine et ça n’aurait jamais dû se produire. Je n’aurais jamais dû permettre une chose pareille d’arriver. Son regard noir, son expression teintée de haine, ses mots assassins, son rejet.
Je ne suis personne. Son poison se distille dans mes veines et la douleur me transperce de milliers d’aiguilles.

J’admire cette femme redoutable en affaires mais perspicace et sensible sous sa carapace. Des rêves, des idées, des projets fous, elle en a eus. Et si elle avait écouté la moitié des conseils – pas toujours bienveillants – des autres, comme ceux de son entourage, elle n’en serait pas arrivée là. Et moi non plus.

Depuis, mon acharnement me le rend au centuple. Je suis fière du chemin parcouru et à trente-quatre ans, je n’ai jamais été aussi épanouie qu’aujourd’hui. Néanmoins, je n’oublie pas mes origines, ni le travail fourni pour y parvenir, consciente que tout pourrait s’arrêter du jour au lendemain.