La machine AIVA est-elle l'un des premiers représentants d'une nouvelle génération de créateurs virtuels partici- pant à l'Histoire que l'on ne pourra alors plus qualifier seulement d'humaine»? Est-elle un fondamental début dont devra nécessaire- ment sortir une redéfinition profonde de nos catégories de pensée, de nos possibilités d'agir, de sentir... d'aimer même? Est-elle le début d'une civilisation qui vient, plus large que toute humanité, trans ou post-humaine non pas par l'ajout de prothèses à notre corps mais par l'ajout d'une nouvelle altérité, d'un nouveau compagnon de route à notre construction sociale et historique?
Si ce monde est beaucoup plus ouvert à la nouveauté que le précédent - ce qui se manifeste par l'accélération drastique des découvertes et inventions entre le XVII et le XX siècle, son étendard reste celui de l'ordre, gouverné par la raison. La société industrielle qui en émerge n'est pas une société de la créativité ou de l'innovation, mais une société de l'optimisation et de l'uniformisa tion incarnée par le trait d'esprit d'Henry Ford: «Les gens peuvent choisir n'importe quelle couleur pour la Ford T., du moment que c'est noir. >>>
La génération au cœur du processus créatif a donc un caractère que nous appellerons dérivatif. Celui-ci permet grâce aux connaissances préalables d'augmenter la probabilité d'aboutir à des résultats adaptés. « Si j'ai pu voir plus loin, c'est que je me tenais sur les épaules de géants», admettait Newton.