Je dépose la sphère. On a eu beau me décrire Jumper, le voir se déclencher m’absorbe tellement que je saute le quatre, à trois je me ressaisis, le sol se creuse sous mes pieds comme défoncé, je recule péniblement d’un pas, attirée par la gravité. Deux. Je l’entends à présent – un bruit de métal tordu – quand une ombre ronge la lumière de ma caverne. Un, la DZ se déforme, les lignes par terre et sur les murs ondulent puis se dédoublent, je fais un effort surhumain pour relever la tête et observer le tourbillon du phénomène fondre sur moi. Zéro. Je me prends le jet en pleine gueule, un mur indécelable s’est dressé autour de moi qui m’oppresse.
Être au monde
La mort me hante, je la sens imminente, prêtre à surgir à tout moment, insidieuse et opportuniste ; elle attend que je trébuche pour m’anéantir. J’en fais des cauchemars, je vois Ricardo se noyer sous mes yeux et je me réveille en sueur, seule dans ma chambre d’hôpital où il fait sombre.
La colère du Filtre m’a possédé sans prévenir et a décuplé mes forces. J’ai saisi le gros chaman avant d’être ingurgité dans la gorge du plafond, abandonnant sous mes pieds la femme-soldat figée sur place. J’eus l’impression de plonger dans un gouffre méphitique pendant que ma rage se transformait en détestation contre la Revenante, le vieux sorcier et leur projet dément. Je ne pourrais expliquer le désir de vengeance qui suivit, mon appétit de punition et l’envie de faire le mal.