François Géré est l'invité de Nicolas Demorand dans le 7/10 de France Inter (8h20 - 3 avril 2009)
Toute guerre s'inscrit dans les mémoires par un traumatisme psychologique.
La pensée stratégique n’est rien si elle n’est pas libre. C’est pourquoi nous récusons par principe la non-prolifération nucléaire, en tant que faux-dogme. Pour autant, nous ne prétendons pas faire de la prolifération un bien. Nous revendiquons le droit d’en examiner l’axiomatique. Le droit de la critique. Le droit de se départir d’une pensée convenue et d’une réflexion convenable qui font certes de vous un interlocuteur valable qui saura "bien se tenir" dans les sociétés stratégiques de cette partie du monde.
Conformisme regrettablement commun à toutes les disciplines, pensera-t-on. Toutefois, dans notre domaine, la stratégie militaire générale, ses effets peuvent s’avérer particulièrement redoutables. Car inspiratrice de l’action, la pensée stratégique porte la responsabilité de son échec. Prisonnière d’a priori, faussée dès le départ, elle n’apportera que de vaines et rassurantes conclusions. La lutte contre le dogmatisme n’est pas une garantie de la justesse du raisonnement, simplement sa condition nécessaire.
Espérer cette sortie par le haut de l’actuelle période d’incertitudes sur l’avenir du système-Monde et celui de la France, c’est accepter, pour un temps, que celle-ci soit condamnée à contribuer à la résolution empirique de situations conflictuelles embrouillées et imprédictibles. Surtout – et cela me paraît bien plus important parce qu’associé à des fins politiques et stratégiques positives – nous devons tenter d’anticiper le fait ou l’événement décisoire qui, dans un futur impensable, tranchera dans les incertitudes et induira nos décideurs à définir une stratégie générale militaire. Il faut donc organiser l’attente de cet événement, se préparer à l’accueillir, quel qu’il puisse être, sans être pénalisé par un possible effet de surprise. De là l’idée d’une stratégie militaire spécifique de cette phase de suspens dans l’espoir de… on ne sait quoi : l’attente stratégique.
Le tyran comme Denys de Syracuse sur lequel pesait l'épée de Damoclès, ayant prit le pouvoir par la force et la tromperie vit dans la crainte d'une entreprise similaire à son encontre. Il a donc sincèrement tendance à s'imaginer l'existence de complots contre sa vie. Cette propension sera évidemment exploitée par ceux de ses courtisans qui entendent se débarrasser de rivaux dans leurs permanentes disputes pour la faveur de l'autocrate. On entre dans le domaine de contre-désinformation : on accuse son adversaire de complot afin de légitimer sa destruction. (p. 153, extrait de l'article "Complot")
Il s'agit d'une guerre de surface et d'une guerre idéologique qui recourt à l'action psychologique, au sabotage, à la guérilla, empoignant de gré ou de force toute une population.
Colonel de Crèvecoeur, avril 1952
Elle présente une extrême perméabilité aux influences idéologiques et aux perceptions de l'environnement géopolitique.
Le groupe palestinien Septembre noir n'a pas raisonné autrement en s'attaquant à la délégation israélienne aux Jeux Olympiques de Munich en 1972.
Il a effectué un détournement de spectacle produisant une sorte d'effet médiatique au carré de sa valeur de départ.
Arme psychologique et armes classiques peuvent être utilisées dans un ordre de priorité différent tant dans l'espace 'le théâtre considéré) que dans le temps (moment favorable soit pour l'une, soit pour les autres).
Affoler la population civile, bouleverser les conditions de vie ordinaire constitue une action de poids mais ce n'est certainement pas sur elle seule que peut se fonder la victoire dans une guerre totale.
On apporte peut être la liberté à la pointe des baïonnettes mais on ne peut prétendre affranchir de ses servitudes féodales celui dont on réquisitionne les récoltes et les maigres outils de production.