François Guillez

Le changement est aussi perceptible dans son image publique. À l’approche de ses soixante ans, Dylan sait que, quoi qu’il fasse, même s’il se coupe de son public, il n’aura plus jamais aucun souci pour « entretenir ses quatorze petits-enfants », et qu’il peut agir comme bon lui semble. « Quand on atteint un certain âge, on se rend compte que la vie est courte. Et alors on ferait mieux de dire ce qu’on a envie. » Dylan n’hésite plus à sortir des vannes idiotes sur scène. Il n’hésite pas à participer à une série uniquement pour s’amuser et parler avec une jolie femme. En 2003, il s’affuble d’une fausse barbe et d’une perruque pour certaines apparitions publiques. En 2009, il fait un album de chants de Noël, ce qui est surprenant pour un Juif, même s’il a été chrétien trente ans auparavant. Surtout, il se tourne complètement en ridicule sur la vidéo qui accompagne cet album. Ses chansons sont utilisées dans des publicités, et parfois même il y participe en personne. L’image qu’il projette dans les media est maintenant le dernier de ses soucis. Cela a toujours été plus ou moins le cas, mais, depuis la fin des années 1990, il y a un changement.
Malgré ce qu’il disait, Dylan se préoccupait de son image. Il a toujours fait attention à sa manière de s’habiller. Il n’y a qu’à voir son évolution vestimentaire sur les pochettes de ses albums pour s’en convaincre. Il faisait aussi attention aux critiques des journalistes, même si c’était pour les rejeter. Il tentait de s’en faire comprendre.
Maintenant, il ne se préoccupe plus de son image : « Je me moque de mon image. Je n’ai pas ce genre de problème. Peu m’importe que mes chansons soient dans tel ou tel film ou programme ou publicité, ou chantées dans des clubs ou des pièces de théâtre. » Ni même si on le comprend ou pas : « Et alors, où est le problème d’être mal compris ? » Dans les années 2000, Dylan ne figure plus sur le devant des pochettes de ses albums. Le dernier où on voit une photo de lui, c’est «Love And Theft», et on ne voit que son visage et le haut de ses épaules. Sur scène, il porte un costume élégant mais classique, genre gentleman-farmer de la fin du dix-neuvième siècle, sans grand changement depuis vingt ans. Dylan adopte encore plus qu’avant une attitude publique distanciée et sceptique : « Ça me préoccupait mais les choses ont bien changé ».