Il y a trente ans, j'avais l'instinct grégaire. J'ai vécu toutes les années 1980 et 1990 en troupeau. Et puis un matin, mon entourage s'est volatilisé. Je suis passé de la foule bruyante à la solitude muette. Je ne pouvais pas protester : ce mouvement s'appelle la vie. Dans son enfance, on passe ses jours et ses nuits avec ses frères et sœurs et puis ils s'éparpillent. On les remplace par une bande d'amis dont on croit, dur comme fer, qu'elle sera sa vraie famille, choisie celle-là, et puis eux aussi s'envolent. La vie consiste à s'entourer de gens qui, progressivement, s'éloignent, se retranchent, se réfugient.