Un jour où je n’arrivais pas à résoudre une équation, il me prit à partie :
– Pourquoi tu ne piges rien ? C’est pourtant clair… J’ai beau expliquer et réexpliquer la démonstration, tu ne captes pas. À mon avis, tu ferais mieux de faire autre chose… Trouve-toi un mari, au lieu de perdre ton temps, à ton âge !
C’en était trop. Je ne pouvais pas encaisser un tel mépris sans réagir, et je me relevai aussitôt de mon siège :
– À vous entendre, Monsieur le professeur, je ne suis bonne à rien ici, et je ne suis au lycée que pour fuir mes prétendants au mariage.
Repiqueuse de riz, les pieds dans la rizière, le dos cassé par le travail, courbée en avant du matin au soir pour enfoncer chaque plan dans la boue, les ongles farcis de terre, la faim au ventre. Ou chercheuse d’eau… /
J’ai réalisé alors pourquoi tant de fillettes du quartier sont de petite taille...