Gilles Paquelier

Un strapontin en poésie ...

Un jour je ferai le voyage
Vers le village des allongés
Où sous les sombres et frais bocages
Reposent tant d’écrivains aimés.

Victor et Charles, Paul et Arthur
Chasseront de la plume dans les venelles.
Je gouterai leur confit de littérature
Leurs vers d’eau de vie éternelle.

Avec eux, point de long sommeil
Manger, boire, lire, écrire toujours
Donner aux muses dès le réveil
Les mots d’un infini amour.

Ils m’offriront une petite place
Un strapontin en poésie
Où peu à peu mon cœur en glace
Battra aux rimes de l’envie.

Seul un pianiste ...

Pas d’amante, seul un pianiste
Dont les notes jouent un air triste
Et le morceau terminé
Glace fondue et mains ridées
Tu lèves ton verre vers l’artiste.

Pas d’ami, seul un pianiste
Longs doigts qui dansent sur le clavier
Et un vieux blues tout déchiré
Un goût de bourbon et d’esclavage
Tu bois des souvenirs douze ans d’âge.

Pas d’amour, seul un pianiste
Chaudes caresses sur l’ivoire
Et la solitude du soir
Qui tombe en mousse d’avalanche
Tu pleures au fond de ta bière blanche.

Il faut du temps

....

Il faut du temps
Pour trouver son visage
Et nage-t-on jamais
Qu'avec un beau courage
Dans le courant qui n'ait
Sur la rivière de l'âge
Déposant sur nos traits
Des rides et des ombrages ?

Où sont passés les doux rayons ?

Où sont passés les doux rayons
Du soleil assoupi dans l'ombre
Du lit en bois de chêne sombre
Où alanguis nous nous aimions ?

...

KO debout

KO debout
Devant tes charmes
Je te l'avoue
Je rends les armes

.....

Les tontons phraseurs
(à Michel Audiard)

Si les tontons phraseurs n'arrêtent pas de tourner
Michel pédale tranquille la-haut sur son orbite
Les anges et le bon dieu doivent bien se marrer
A ses saillies gauloise en bâtons de dynamite

Gland des siciliens

On l'appelait Gland des siciliens
L'avait pas inventé la poudre
Dans notre bande à St Gatien
L'était le premier à en découdre

Elles

Elles mettent de l’or dans nos boues
Des vagues douces sur nos plages
Ouvrent au désir de passage
Nos cœurs confits qui battent mous

Elles guérissent nos amertumes
Sur l’oreiller de leurs seins lourds
Offrent un sirop de pur amour
A nos vies qui parfois s’enrhument

Elles sont nos reines et nos jouissances
Les fées mutines de nos nuits
La terre en collines alanguies
Qui porte en germe notre enfance

Elles sont les muses de nos poèmes
L’hostie au levain de tendresse
Qui fond en bouche comme une caresse
Sur tous les écrits que l’on sème.

Avoir un ticket

Avoir un ticket avec une contrôleuse
Un doux billet d'amour tendrement composté
....

Tomber dans les mailles du filet de Martine
Une fille de pêcheur qui m'avait hameçonné
....

Hildegarde

Monte à ma tête au creux du soir
Un air de jazz mélancolique.
Un vieux buffet de rouges briques
Allume ses néons dans le noir.

Je me souviens du vieux Füssen
De la fille aux cheveux de lin
Qui accueillit contre ses seins
Mon corps puceau enfin en veine.

Comme une liane aux doigts de louve
Elle enserra mon cœur battant
Dans un étau d’émoi levant
Un fourreau doux d’amour qui couve.

A l’heure où la vieillesse sonne
Me revient la douce bavaroise
Dont la bouche sucrée framboise
Eveillât mes premiers désirs.