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Critiques de Guillaume Cazenave (3)
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Full Metal Bastos

"Attention mesdames et messieurs, dans un instant ça va commencer, installez-vous dans votre fauteuil bien gentiment…

5, 4, 3, 2, 1, 0, partez, tous les projecteurs vont s'allumer, et tous les acteurs vont s'animer en même temps".

Oui mais voilà, dans le 115ème épisode d'Histwar, intitulé "Full Métal Bastos", les personnages ne sont pas des acteurs payés pour suivre un scénario, mais des "vrais gens" volontaires pour se faire la guerre dans un pays lointain. Le survivant sera bien sur le gagnant.

Alors bien sûr, même si les téléspectateurs ne peuvent pas voter pour leur favori parce que les balles tirées sont de vraies balles, et que les bombes cachées explosent aussi bien la rue que les gens, ça ne les empêche pas d'avoir leur chouchou, à choisir entre le héros soldat américain, le traitre, le fourbe Irlandais (celui-là n'est pas le chouchou de beaucoup de monde), la gamine maline et malingre…



J'ai beaucoup aimé cette courte nouvelle dans un futur pas si lointain de Guillaume Cazenave. Dans un univers très visuel (l'auteur est également co-fondateur d'une société de production audiovisuelle), très cohérent avec le sujet, l'auteur déroule la pelote de la téléréalité jusqu'à sa lie : après des gens qui vivent ensemble, qui s'aiment ou pas ensemble, qui vivent dans un château ou sur une île inhospitalière, qui chantent bien ou dansent encore mieux, etc… (désolée, je suis un peu "short" en terme d'émissions de téléréalité, je regarde peu la télé), passons à la vitesse supérieure avec les gens qui s'entretuent. Ça laisse présager des alliances temporaires, des trahisons, de l'inattendu et beaucoup d'actions. Sûr que ce type de programmation aurait du succès dans nos chaumières.

Pour dérouler son scénario, G. Cazenave explore les clichés et stéréotypes jusqu'à plus soif : le héros américain, chouchou d'une grande partie des fans, tout le monde le connait et le reconnait, il est sur toutes les affiches au cinéma (c'est vrai qu'ils se ressemblent un peu tous, non ?) ; les actions, elles, reprennent les codes du film d'action. Avec un humour noir caustique, on a l'impression que l'auteur se moque aussi bien des héros de sa téléréalité que de ceux derrière leur écran. La chute, bien qu'un chouïa prévisible, est bien amenée, et permet de refermer la nouvelle le sourire sur les lèvres.



Aux USA, un site permet, parait-il, de présenter un ensemble de malades qui ne peuvent se soigner, faute de moyens. Aux internautes de voter pour élire celui qui sera soigné. Alors je me dis que s'entretuer devant le petit écran, ce n'est peut-être pas si fou que ça…



Bref, pour notre plus grand bonheur et sans temps mort, G. Cazenave joue encore une fois les troublions en amenant à son paroxysme l'un des "petits" travers de la société. Rapide, rythmé, amusant, Full Métal Blastos, avec son titre barbare et ses personnages caricaturés, me semble une bonne façon de découvrir cet auteur !

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Dogs

Donatello Minaï est le Dog de la famille de Rolles. Ses comportements, ses gestes, ses activités, tout dans sa vie est lié à ce collier qu'il porte autour du cou et qui permet de circonscrire sa présence à un périmètre donné, de transmettre des décharges électriques quand il n'obéit pas assez promptement, et d'y accrocher une laisse pour les promenades avec sa maitresse. Toute la journée, il sacrifie au dieu Planning, dans lequel sont minutées toutes ses actions, y compris la conception d'un petit Dog avec la blonde Lisa, petite fée aux ailes brisées, la Dogue d'une amie de Mme de Rolles.

Mais nul ne soupçonne que réside sous le placide visage du Dog servile un dernier espace de liberté. Comme le Léviathan dont il lit les aventures avant de s'endormir, une force rebelle pleine d'énergie se trouve en lui, qui n'attend qu'une occasion pour s'enfuir de ce présent sans espoir d'amélioration. Aussi quand, par une chaude après-midi de canicule, Mme de Rolles a un malaise, Don n'hésite pas à la faire chanter pour obtenir le code d'ouverture de son collier et à s'enfuir dans la Ville Grise. Le Léviathan est lâché !



Si l'on évaluait l'évolution d'une société à la façon dont elle prend en charge ses prisonniers et ses personnes âgées (et personnellement, je trouve que c'est un bon indicateur), le niveau social de La Ville Grise, cadre dans lequel se déroule Dogs, frôlerait les pâquerettes. Les deux premiers chapitres de ce livre m'ont heurtée par leur violence. Qu'on se rassure, ces chapitres ne dévoilent pas des sévices sadiques inédits. Non. C'est la façon dont l'auteur, au travers de ces quelques pages, arrive à poser d'entrée de jeu un mode de vie dans lequel on nie, on efface, on déchoit des hommes et des femmes de cette caractéristique qui me parait pourtant inaliénable : être des êtres humains.

Les Dogs sont donc des êtres humains déchus suite au jugement d'un crime qu'ils ont commis. Rien à voir avec ces gentils toutous qui font la joie de la famille, trainant leurs puces du lit au canapé et attendant la queue battant d'un plaisir anticipé le remplissage de la gamelle ou la tournée des caniveaux. Le Dog tient plus de l'esclave que du chien, ne s'en rapprochant que par son statut de bête sans espoir d'évolution (un Dog reste un Dog, imaginons quand on nait Dog…) et, de plus loin, par quelques expressions du langage courant comme "il fait un temps de chien" ou "il le traite comme un chien". Le plus effrayant, dans cette acceptation commune du statut de Dog, c'est que, suite au "traitement" qu'ils subissent avant de rejoindre le chenil, adaptation réussie du conditionnement pavlovien (oui, oui, on reste dans le domaine canin), les Dogs sont les premiers à s'approprier leur condition, à l'assumer.

Après cette entrée en matière qui donne clairement le ton, le récit se déroule plus classiquement, avec la fuite de ce jeune héros et les différentes stratégies qu'il met en œuvre pour tenter de rester libre. On suit les coups d'éclat souvent futiles de Don, en se disant que tout cela ne va pas bien se terminer. Et en effet, dans Dogs, il n'y a pas de pardon ou de grâce, et pas beaucoup d'humains ou de Dogs pour redonner foi en l'espérance d'un devenir meilleur et plus humain.



J'ai apprécié plusieurs choses dans cet ouvrage. En premier lieu, la matérialisation des différentes instances psychiques qui accompagnent Don dans son évasion et dans sa fuite : ce qu'il appelle l'Inframonde d'une part et qui se manifeste par des voix, et le Léviathan de l'autre, réservoir d'énergie, mélange de colère et de ressentiment, qui ne demande qu'à exploser. Psychanalytiquement (on ne se refait pas), ce sont de jolies illustrations d'un surmoi sadique et des forces pulsionnelles de l'inconscient.

Le récit se déroule sous un rythme régulier, avec des moments de tension et de relâche. Des informations sont données au fil de la lecture sur le fonctionnement de cette société, sur le système Dog, sur le passé de Donatello. Le ton du récit est détaché, sans fioriture, presque clinique, impression renforcée par de nombreuses références à l'art cinématographique.

J'ai trouvé amusant le nom des chapitres : 26 chapitres, chacun commençant par une lettre de l'alphabet, déroulant l'abécédaire jusqu'à la fin.

J'ai moins aimé les "coquilles" typographiques de la version que j'ai lue (fautes d'accord par exemple), ou une propension importante à la répétition du sujet des phrases ("le Dog, il…"). J'ai trouvé également que la fin n'était pas à la hauteur du reste du récit, mettant en œuvre une sorte de Deus ex-machina assez peu crédible par rapport au reste, et offrant au lecteur un dénouement en demi-teinte.



Quoiqu'il en soit, l'avantage d'une dystopie (car Dogs en est une) est de pouvoir pointer du doigt des dysfonctionnements, de mettre en relief les conséquences de possibles choix de société. Dans ce cadre, Dogs peut être lu comme une parabole sur les laissés pour compte de la société, les prisonniers bien sûr, mais aussi les SDF (des chiens sans colliers !), les personnes âgées, les malades. J'y ai vu également des références aux grands crimes contre l'humanité : le tatouage du numéro d'identification des Dogs rappelle celui des prisonniers des camps de concentration, et les appels à la délation sont légion pour retrouver le Dog en fuite. En filigrane, ce livre aborde également la non-prise en charge de la maladie mentale, celle du malade bien sûr, mais aussi la douleur, plus souvent tue, de son entourage. Des sujets graves, évoqués en pointillé, dans un texte fluide et non dénué d'un humour souvent noir.



Il me reste à remercier chaudement Guillaume Cazenave qui m'a proposé de façon très courtoise de lire ce "premier roman" (il a par ailleurs publié des recueils de nouvelles, des livres pour enfant, des albums de musique…). Je lui souhaite bonne chance dans sa recherche d'éditeurs (la maison d'édition qui publiait ce roman a déposé bilan) et attends avec impatience de découvrir la prochaine histoire qu'il aura envie de nous raconter !

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Dogs

Pour mon plus grand plaisir, Guillaume Cazenave m'a contactée via Babelio pour me proposer de lire son roman, Dogs. Publié en fin d'année dernière, ce titre n'a malheureusement pas eu la mise en place qu'il méritait, son éditeur ayant été mis en liquidation judiciaire. Il n'est donc aujourd'hui disponible qu'en numérique. C'est donc sur mon tout nouvel Ipad que je me suis finalement plongée dans cette histoire...



Le "système Dogs" consiste à faire des prisonniers qui encombrent les prisons des Dogs, plus vulgairement des chiens. Tout y est, le collier, le maître, le chenil... Mais les Dogs s'apparentent bien plus aux esclaves, leur collier étant relié par une chaîne au maître, lui permettant d'électriser son Dog au gré de ses envies, ce dernier devant donc obéir à ses moindres caprices. Le Dog n'a ni passé, ni avenir, il vit au jour le jour selon les tâches que lui attribuent ses maîtres. Il ne fait rien pour lui-même, a perdu toute notion d'espoir, d'optimisme, de bonheur. Donatello Minaï est l'un d'eux, survivant tant bien que mal auprès de la famille Des Rolles, dans un monde qui lui semble uniformément gris. Mais lorsque sa maîtresse le force à s'accoupler avec une Dogue femelle, Donatello commence à se poser des questions...



J'ai été très surprise par cet ouvrage et par l'histoire qu'il nous offre (peut-être parce que je suis très peu habituée aux uchronies). Dogs m'a proposé quelque chose de différent de ce que j'ai l'habitude de lire, et je trouve que c'est le genre d'histoire qui fait se poser pas mal de questions sur notre système carcéral actuel, sur les risques que nous avons de tomber un jour dans de tels excès, sur ce qui pourrait rendre cette fiction cruellement réelle. Donatello est attachant, on le découvre petit à petit, pas assez rapidement à mon goût, puisque j'avais très hâte de savoir comment il en était arrivé là. Mais j'admets que le suspense est nécessaire à l'histoire. On a tendance à l'apprécier, sans savoir quels sont ses crimes, ce qui est assez déroutant. J'aurais par contre apprécié un peu plus d'explications sur le "système Dogs" en général, le texte s'attardant plus sur le Dog lui-même, sa condition quotidienne, ce qu'il est et ce qu'il n'est pas (plus). Je me demande par exemple depuis combien de temps le système est en place, à partir de quel degré de crime on passe de la prison au chenil, plein de petits détails comme ça qui m'ont manqués tout au long de l'ouvrage...



Mais ces questions n'ont pas gâché mon plaisir de lecture (c'est quand même le plus important !), et j'ai été très curieuse tout au long de l'histoire d'en connaître l'évolution, de savoir où l'auteur veut nous emmener. L'action commence tout doucement pour s'accélérer jusqu'à la fin, et on ne s'ennuie pas une minute. Même si vous n'êtes pas fan de ce genre de romans, laissez-vous tenter !



Un grand merci à Guillaume Cazenave pour cette découverte de son roman et de son univers, et pour sa confiance.
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