Gustave Clausse

Deux ordres de décoration rehaussaient seuls, au moyen âge, l'austère grandeur des églises et des basiliques.
Quelques rares peintures à fresque, mais plus souvent de superbes mosaïques murales venaient apporter à leur simple et sévère architecture une note lumineuse, et nous nous sommes rendu compte, dans un précédent ouvrage, de l'immense importance à laquelle ces grandes représentations étaient souvent parvenues.
A ces manifestations d'un art véritablement merveilleux, il faut adjoindre les divers travaux de marbrerie et de sculpture faits aux mêmes époques, comprenant, avec les riches pavements multicolores, le Mobilier
presbytéral, c'est-à-dire les autels, les ciboria, les ambons, les cathedra, les balustrades, les tombeaux, tous les édicules enfin, élevés à travers les nefs et les sanctuaires pour servir à l'exercice du culte, ou s'y rattachant d'une façon quelconque.

De tous temps. le Milanais a été une terre privilégiée, mais sa situation géographique et la richesse de son territoire lui ont toujours attiré les convoitises de ses puissant voisins. Les dernier empereur romains d'Occident avaient fait de Milan leur résidence favorite et la papauté avait établi dans cette ville populeuse et florissante le siège d'un important évêché.

Ayant d'entreprendre une étude complète de la vie et des œuvres d'un artiste aussi illustre qu'Antonio da San Gallo le jeune, il est indispensable de rechercher à quelle phase du grand mouvement général il va prendre part, au milieu de quelles influences supérieures cet astre nouveau va évoluer et tracer son orbite dans le firmament où brillent déjà tant de planètes étincelantes, quelle action enfin le milieu dans lequel il va vivre pourra exercer sur l'épanouissement de ses facultés et l'éclosion de son génie.

Aux premiers siècles de la civilisation grecque, lorsque les peuples se furent groupés autour d'un chef pour fonder une cité et créer un royaume, une des principales prérogatives du pouvoir souverain était de rendre la justice. A cet effet, la demeure royale comprenait, parmi les locaux les plus importants et les plus considérables, une vaste salle où pouvait se réunir la foule des plaideurs assistés de leurs clients; elle servait, en outre, aux assemblées du conseil et on y discutait les affaires.
Le nom de Maison Royale s'appliqua dès lors, non seulement à l'ensemble du palais du roi, mais, par dérogation, on désignait également sous ce nom la grande salle où s'exerçait une partie importante du pouvoir souverain; nous disons aujourd'hui la Chambre royale.

Les auteurs modernes, artistes ou historiens, se sont en général peu préoccupés de la large part qui, selon nous, revient aux marbriers dans le développement des arts au moyen âge; mais les beaux travaux de J.-B. de Rossi, le rénovateur de l'archéologie romaine, ainsi que de nombreux articles publiés sous sa direction dans le Bullettino di archeologia cristiana et dus à la plume autorisée de certains de ses collaborateurs, nous ont été d'une grande utilité. Les savantes publications de M. E. Mütz, dont la science profonde, mise au service de tous avec tant de bonne grâce, fait autorité en tout ce qui touche aux arts italiens, nous ont également fourni d'intéressants renseignements.

Quelques aventuriers normands venus en pèlerinage au monastère de Saint-Michel, sur le mont Gargano, dans la Pouille, furent engagés par un chef italien nommé Mell ou Melès, afin de l'aider à combattre les gens du voisinage et à étendre ses domaines : en récompense de leurs services, il leur donna du butin et des terres. De retour en Normandie, ils n'eurent pas de peine à recruter de nouveaux compagnons et retournèrent trouver Mell. D'abord vainqueurs dans plusieurs combats, mais vaincus eux-mêmes dans une dernière rencontre avec l'armée grecque, ils se réfugièrent sous la protection du prince de Salerne; et l'un d'eux, Godefroy de Ringon, poussa même jusqu'à Rome pour offrir ses services au pape.

Ces braves bourgeois de Prato qui reçoivent du ciel, c'est bien le cas de le dire, une forte somme d'argent, veulent en faire quelque chose, mais ne savent pas bien quoi ; ils s'érigent en assemblée générale, nomment des commissions,mais trouvent toujours moyen de faire de l'opposition, jusqu'à ce qu'ils se soient décidés à prendre l'avis d'un seul et à s'en remettre à son autorité. On reconnaît bien ici,quoique dans un ordre de faits de bien moindre importance, la voie suivie par toutes les républiques italiennes pour arriver à se donner un maître : témoignage de méfiance et d'impuissance que nous aurons encore l'occasion de constater autre part.

Pendant les dernières années qui précédèrent le siège, années remplies de troubles et dé convulsions, les arts et les lettres avaient été complètement abandonnés, seul Michel-Ange continuait à sculpter les superbes figures destinées aux tombeaux de Laurent et de Julien de Médicis, tout en faisant achever, a l'église Saint-Laurent, la chapelle qui devait les abriter. Mais en 1528, tout travail intellectuel cessa, toutes les forces de la République furent employées à la résistance.

Après un séjour de deux années à Ostie, Giuliano revint à Florence et se trouva immédiatement chargé de la construction d'une église à laquelle il sut donner le caractère d'une création originale et l'importance d'une oeuvre d'art de premier ordre...
Cette église, située à Prato, et appelée la Madonna delle Carceri, a une histoire fort curieuse qui mérite d'être rapportée; c'est un exemple frappant de ce que devait être la genèse de bon nombre de fondations pieuses au moyen âge.

Vers la fin du siècle dernier, se présentait à l'école dirigée par M. Jost à Reichenau un jeune homme demandant à être reçu comme professeur. Il fut admis et eut à diriger les classes de littérature française et de mathématiques. Il se faisait appeler M. Chabot. Ce jeune professeur était le duc de Chartres, Louis-Philippe d'Orléans, qui devait, après avoir porté la couronne de France, aller tristement mourir en exil.