Hans Bisanz

Kubin a été un dessinateur original et puissant, illustrant de ses visions, peuplées de fantômes et de carnages, de bêtes et de divinités étranges, de ses paysages aux maisons hantées et aux tours solitaires, un monde pourrissant qui allait se disloquer et qu'il se représentait, marqué par la philosophie de Schopenhauer, comme un chaos de forces aveugles et contradictoires. L'homme n'y apparaît que sous les formes d'une caricature, vaniteux et grotesque, ou bien sous celles d'une silhouette écrasée face à l'ombre d'une puissance qui la menace. On l' a même souvent qualifié de "diabolique", bien qu'il ait su, au fil du temps, mettre dans son oeuvre de la couleur et du mouvement, voire de la lumière. A dix ans il avait perdu sa mère. Sa fiancée fut aussi plus tard emportée. Il avait mené dans sa jeunesse, qu'il passa à étudier l'art à Munich, une vie dissipée, souvent en proie au plus profond désespoir qui donnerait à son oeuvre son sang véhément et un peu noir, bien qu'atténué par son goût pour le rêve et la spiritualité. Il était à la charnière de tous les courants d'alors : héritier du symbolisme, il annonce l'expressionnisme, il participa activemenent au Blaue Reiter, tandis que ses motifs décoratifs étaient ceux de l'art nouveau. Il illustra aussi de nombreuses oeuvres littéraires et nous laissa à côté d'essais, de nouvelles, de récits autobiographiques, aussi concis que poignants, un roman fantastique.