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Citation de art-bsurde


En Europe, la démocratie s'est constituée après la subordination du religieux au politique. La tolérance civile (au sens de non-religieux) est la matrice de toutes les libertés d'opinion. Une société est « civile » quand on y protège la liberté de croire ou de ne pas croire ; quand les croyants n'y sont pas supérieurs aux incroyants ; quand le temps social n'y est plus ordonné par les matines, les vêpres, ou les appels du muezzin ; quand la perte de la foi n'y est plus vécue comme un crime spirituel et un scandale social ; quand on accepte, sans sursaut de honte ni d'horreur, que l'homme puisse vivre, s'il le souhaite, sans l'idée de Dieu ; quand le blasphème n'est plus un délit ; quand l'hérésie n'est plus vilipendée et que la mécréance n'est plus châtiée. On est alors dans une métaphysique civile et démocratique. Autrement non.
Or il semble qu'on ne puisse se passer, chez nous, des symboles et des mélodies de la religion, de ses rites, de ses usages, de ses bienséances, sans être désigné comme un énergumène sans foi ni loi. Notre foi n'est pas individuelle, elle est une évidence collective, conformiste, elle ne peut se passer du regard d'autrui. Quels que soient ses mérites et ses attraits, la liberté humaine est restée au-dessous du service de Dieu ; elle n'a pas atteint ce degré de dévouement extrême qu'elle a connu dans le cœur des grands hommes libres qui l'ont servie.
Non, nous n'avons pas cherché à acquérir un pouvoir réel sur les choses. Si volontariste que l'on soit, la décision finale revient à Dieu, murmure-t-on à chaque occasion. Nous avons gardé cette conviction que la politique n'était pas de notre seul ressort. Peut-être est-ce là le dessein d'un autre idéal de société. Nous n'avons pas encore atteint la distance du sceptique, pour lequel le commerce du néant et la compagnie de l'absurde ont le visage des gardiens inoffensifs que n'assombrit pas la couleur tragique de l'existence. Qui nous dictera nos préceptes de vertu si Dieu nous abandonne ? Comment ne pas sombrer dans la folie s'il n'y a plus de Juge suprême pour nous arrêter dans nos excès ? Comment la charité ne finira-t-elle pas par s'éteindre dans notre cœur ? Qui nous retiendra sur le pente de nos mauvais penchants ? Qui nous enseignera la bonté ? Comment reconnaîtra-t-on le vice ?
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