Les différences essentielles entre le système de Jung et celui de Freud peuvent se résumer ainsi.
Tout d'abord, leurs fondements philosophiques sont entièrements différents. La psychologie analytique de Jung, comme la psychanalyse de Freud, est un rejeton tardif du Romantisme, mais la psychanalyse est en même temps l'héritière du positivisme, du scientisme et du darwinisme. La psychologie analytique, au contraire, rejette cet héritage pour retrouver les sources inaltérées du Romantisme psychiatrique et de la philosophie de la nature.
En un second lieu, tandis que Freud se propose d'explorer cette partie du psychisme humain dont les grands écrivains avaient une connaissance intuitive, Jung cherche à aborder objectivement et à annexer à la science un domaine de l'âme intermédiaire entre la religion et la psychologie.
Janet était un homme d'habitudes, économe et ordonné; il était aussi un collectionneur passionné. Sa principale collection fut consacrée à ses malades : plus de 5000 observations, soigneusement écrites de sa main, occupaient toute une pièce de son appartement. Une autre pièce était occupée par sa vaste bibliothèque, qui comportait une collection unique des oeuvres des anciens magnétiseurs, mais aussi de nombreux livres qui lui avaient été offerts par leurs auteurs. Son herbier, de belle taille, composait une troisième collection ; il comportait les plantes que le savant recueillit et classa tout au long de sa vie.
Hervey a eu le mérite d'attirer l'attention sur la plasticité du processus onirique. Mais la technique qu'il avait imaginée pour maîtriser et diriger consciemment ses propres rêves s'avéra si difficile qu'il n'eut que fort peu d'imitateurs.
L'un d'eux fut le psychiatre et poète hollandais Frederik Van Eeden, qui entreprit, en 1896, d'étudier ses rêves grâce à une technique voisine de celle de Hervey. Comme Hervey, auquel il se réfère, Van Eeden dit qu'il a pris conscience de ses rêves avant d'être à même de les diriger à volonté. Il publia d'abord ses observations à travers un roman, La Fiancée de la nuit, car il hésitait à assumer la paternité de ses découvertes, en raison de leur caractère insolite. Il en rendit pourtant compte dans une communication à la Société de recherche psychique dans laquelle il distinguait différents types de rêves, entre autres les "rêves démoniaques" où il avait affaire à des êtres non humains, indépendants, capables d'agir et de parler. Il fit aussi l'expérience de "rêves lucides" où il se proposait de rencontrer des morts avec qui il avait été lié. Il affirmait aussi avoir pu transmettre un message subliminal à un medium, par l'intermédiaire d'un rêve lucide. Les expériences de Hervey ont peut-être bien inspiré le roman de George du Maurier, Peter Ibbetson, grand succés des années 1890, où deux amants qui se trouvent séparés découvrent un moyen pour se rencontrer chaque nuit dans leurs rêves, et se mettent à explorer ensemble le monde de leur enfance, celui de leurs ancêtres et celui des siècles passés.
Janet subit une influence plus personnelle de la part de Jean-Marie Guyau, l'auteur de L'Irreligion de l'avenir, ouvrage qui marqua la pensée de beaucoup de jeunes intellectuels français de sa génération. La vision du monde de Guyau était celle d'un homme profondément religieux, ne se rattachant à aucune des religions établies et n'ayant jamais pu se résoudre à adopter ni un crédo religieux ni l'athéisme.
On a souvent vu dans le Romantisme une réaction culturelle contre les Lumières: tandis que l'esprit des Lumières soulignait la valeur de la raison et de la société, le Romantisme avait le culte de l'irrationnel et de l'individuel. Les tendances mystiques qui avaient été refoulées à l'arrière-plan par les Lumières se voyaient à nouveau libérées.
Darwin lui-même avait pris soin de ne pas empiéter sur le terrain de la philosophie, mais ses disciples estimèrent pouvoir déduire un système philosophique de ses idées, en particulier une nouvelle conception de l'évolution et du progrès. L'époque des Lumières voyait dans le progrès un cheminement continu de l'espèce humaine sous la direction de la raison, visant au bien-être et au bonheur de l'humanité (y compris de ses membres les plus déshérités). Les romantiques avaient donné libre cours à leurs spéculations sur un processus sous-jacent à la nature, mettant en jeu des forces irrationnelles et inconscientes, mais n'en suivant pas moins une fin rationnelle. or, voici que le darwinisme supposait l'existence d'un progrès biologique parmi les espèces vivantes et d'un progrès social, voire moral, au sein de l'humanité par le simple jeu, automatique et mécanique, d'événements fortuits et d'une lutte aveugle et universelle. Les athées s'emparèrent de cette idée et en firent une arme contre la croyance en La Création et contre la religion elle-même; mais, si certains groupes continuèrent, au nom du "fondamentalisme" biblique, à lutter contre le darwinisme, la plupart des théologiens eurent tôt fait de concilier l'idée d'évolution avec la religion. Le botaniste américain Asa Gray (1810-1888), premier partisan fervent de Darwin en Amérique, fut, semble-t-il, le premier à situer la pensée évolutionniste dans une "perspective théiste".
...les symboles deviennent des transformateurs d'énergie. L'assimilation d'un symbole libère une certaine quantité d'énergie psychique qui pourra dès lors être utilisée au niveau conscient. Les rites religieux et magiques comme ceux que les peuples primitifs accomplissent avant la chasse ou la guerre, permettent de mobiliser l'énergie à des fins précises.
On dit que la mère de Pierre était une femme d'une grande sagesse, sensible et affectueuse. Pierre lui resta profondément attaché et parla toujours d'elle avec une vive affection. Il était le premier enfant d'une mère très jeune ; elle avait 21 ans à sa naissance, tandis que son père en avait 45, une génération de plus.
Deux autres traits de la personnalité de Janet méritent également d'être soulignés. Le premier se rapporte à l'épisode dépressif qu'il traversa à l'âge de 15 ans et correspond à sa tendance à la psychasthénie qui ne se manifestera guère dans ses années de maturité, mais qui se fit sentir de nouveau dans les dernières années de sa vie. (...)
Le second trait se rapporte à la crise religieuse par laquelle il passa à l'âge de 17 ans et qui fut certainement un événement capital. Janet n'aurait peut-être pas suivi aussi attentivement le cas de Madeleine pendant plus de vingt ans s'il n'avait pas été lui-même continuellement préoccupé de la foi perdue de sa jeunesse.
Nous possédons quelques notes de madame Hélène Pichon-Janet sur la vie familiale de Pierre. Ses parents étaient tous deux plutôt réserrvés dans l'expression de leurs sentiments, dit-elle, mais ils ne se quittèrent jamais l'un l'autre, et étaient vraiment inséparables. Madame Janet accompagnait son mari dans tous ses voyages et il ne pouvait se passer d'elle dans sa vie sociale ni pour régler les questions pratiques. Elle ajoute qu'il était un père affectueux et tendre. Ainsi, bien qu'il fût extrêmement absorbé par son travail, il trouvait toujours un moment pour faire la lecture à ses enfants après le dîner.