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Citation de coco4649


Difficultés (1930)
MOUVEMENTS DE L'ȆTRE INTÉRIEUR

La poudrière de l’être intérieur ne saute pas toujours. On la croirait de sable. Puis, tout à coup, ce sable est à l’autre bout du monde et, par des écluses bizarres, descend la cataracte de bombes.
En vérité, celui qui ne connait pas la colère ne sait rien. Il ne connait pas l’immédiat.
Puis la colère rencontre la patience lovée sur elle-même. Sitôt touchée, celle-ci se dresse et se confond avec celle-là, et fonce comme un obus et tout ce qu’elle rencontre elle le renie et le transperce.
Puis, roulant ensemble, elles rencontrent la confiance à la grosse tête et les autres vertus, et la débâcle s’étend à toutes les zones.
La vitesse remplace le poids et fait fi du poids.
Comme un cil pointant au bord d’une paupière y est mieux à sa place qu’au bout d’un nez, la vélocité est à sa place dans l’être intérieur. Elle y est plus naturelle que dans la patte d’une tortue atteint de paralysie.
Quand la concupiscence halant ses bateaux de fièvre dans la campagne immense de l’être intérieur… Quoi ! Qu’est-ce donc que cette brume qui monte ?
L’être intérieur combat continuellement des larves gesticulantes. Il se trouve tout à coup vidé d’elles comme d’un cri, comme de détritus emportés par un ouragan soudain.
Mais l’envahissement reprend bientôt par le bas, et le calme d’un instant est soulevé et troué comme le couvercle des champs par les grains de blé avides de croître.
Il faut voir l’être intérieur attaquant la concupiscence. Quel boulanger plongea jamais d’aussi énormes mains dans son pétrin ? Quel boulanger vit-on pareillement accablé par la montagne mouvante, montante, croulante, de la pâte ? Une pâte qui cherche le plafond et le crèvera.
L’être intérieur collabore avec la concupiscence dans la joie ou avec réserve. Mais toujours il est traqué par cet envahisseur gonflant.
L’être intérieur a tous les mouvements, il se lance à une vitesse de flèche, il rentre ensuite comme une taupe, il a d’infinie hibernations de marmottes. Quel être mouvementé ! Et la mer est trop mesquine, trop lente pour pouvoir lui être comparée, la mer à la gueule ravagée.
Enfin, s’attaquant à l’homme vaincu d’avance, la Peur,
Quand la peur, au ruissellement mercuriel, envahit la pauvre personnalité d’un homme qui devient aussitôt comme un vieux sac,
Écartant tout quand elle entre, en Souveraine, s’assied et se débraille sur les sièges culbutés de toutes les vertus,
Décongestif unique du bonheur, quand la Peur,
Quand la Peur, langouste atroce, agrippe la moelle épinière avec ses gants de métal…
Oh, vie continuellement infecte !
Le désespoir et la fatigue s’unissent. Et le soleil se dirige d’un autre coté.

p.131-132-133
Extraits PLUME précédé de LOINTAIN INTERIEUR, Nouvelle édition revue et corrigée, GALLIMARD 1963
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