AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Medelie


Nous envisagions une grande promenade jusqu’à Notre-Dame-d’Afrique, lieu de pèlerinage, et avions besoin d’un guide. Lorsque ce dernier, qui semblait quelque peu lent et lourd, se présenta, nous lui demandâmes s’il était bon marcheur.
« Voilà qui serait plaisant si je me laissais distancer par des femmes ! » répondit-il, vexé.
Il n’en fallut pas plus pour inciter l’impératrice à lui jouer un tour. À vive allure, nous grimpâmes la colline assez raide située à l’ouest d’Alger. Le paysage était varié et, plus nous montions, plus la vue portait loin sur les terres et la mer. Notre rythme ne convenait pas du tout à notre guide ; il s’y pliait néanmoins. Au bout de deux heures et demie, nous atteignîmes Notre-Dame-d’Afrique, mais nullement le sommet de la colline.
La basilique n’était pas un édifice particulièrement réussi. La vue s’offrait de là-haut à nos regards était donc d’autant plus appréciable. Juste à côté de l’église, il y avait une grande croix blanche sur laquelle on pouvait lire : « Priez pour ceux qui ont péri en mer », et nous priâmes du fond du cœur, recueillies face à la mer souriante, cimetière infini.
Puis nous poursuivîmes l’ascension à une allure vraiment infernale. Notre guide soufflait comme une locomotive et, à son expression, on voyait bien que pour lui la plaisanterie avait assez duré. Et en effet, il y mit un terme ; il s’immobilisa et expliqua qu’il ne connaissait pas le reste du chemin. Nous dûmes donc faire demi-tour pour ne pas être laissées en plan. Durant le trajet du retour, le malheureux trébucha de plus belle. L’amertume et les reproches se lisaient sur son visage couvert de poussière.
Pour lui apporter quelque réconfort, une fois en ville nous entrâmes dans un café maure : le brave homme pourrait s’y rafraîchir un peu. Les clients s’entassaient dans l’établissement, ou plutôt dans la cuisine, enveloppés d’un nuage de fumée. Chaque fois que nous pénétrions dans de tels endroits, j’étais saisie de peur et d’inquiétude. Pourtant, l’impératrice devait sans doute exercer un charme merveilleux, car aussitôt les turbulents se turent, les autres s’écartèrent avec respect et, tant que nous y restâmes, il régna dans le petit café une sorte de solennité.
Cette fois, l’impératrice passa elle-même sa commande. En de tels moments, elle était la grâce et la cordialité personnifiées, et la façon dont elle remercia le serveur poussa notre étrange entourage à lui témoigner une quasi-dévotion.
Malgré tous nos efforts, nous ne réussîmes pas à nous réconcilier avec notre guide, et lorsque, une fois rentrées à l’hôtel, nous voulûmes l’engager pour les jours suivants, il refusa : n’étant pas un marcheur rapide, il était incapable de parcourir trente kilomètres par jour en gravissant et descendant des collines. L’aveu de sa conduite ridicule plut énormément à l’impératrice.
Commenter  J’apprécie          50









{* *}