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Citation de Cazaubon78


Le dojo consistait en une pièce d'une trentaine de mètres carrés. Un rez-de-chaussée donnant sur rue, des pratiquants en kimono noir, bien alignés et accroupis dans la position du lotus pour les expérimentés, du demi-lotus pour les néophytes. L'endroit fleurait bon l'encens. Trois coups de gong signalaient le début de la séance. Après le gassho, la salutation d'usage, chaque participant s'asseyait sur un zafu, un coussin noir arrondi, rembourré de coton. Il joignait ses deux pouces, redressait le dos, relâchait les épaules et inclinait son regard à quarante-cinq degrés sans jamais fermer les yeux. Il ne s'agissait pas de s'assoupir mais de vivre l'instant présent en pleine conscience. Ici et maintenant.
Derrière le mur qui séparait les adeptes du zazen du monde extérieur, frénétique, on entendait des bruits de talons sur le trottoir, des gens qui parlaient fort, des rugissements de scooters et autres pollutions sonores. Mais le maître expliquait que ces nuisances n'étaient que des phénomènes et qu'en étant assidu dans la pratique de la méditation, on finissait par ne plus les remarquer.
Il en allait de même pour les pensées. Elles passaient comme les nuages dans le ciel. Ne pas les retenir ni les chasser de son esprit. Seulement les contempler, en simple spectateur. Se concentrer sur la posture et la respiration, un souffle profond et régulier, tel était le secret de cet enseignement éprouvé depuis plus de deux mille ans. On pouvait alors parvenir non au satori, l'éveil que seuls quelques grands sages avaient atteint, mais à une altération de la conscience, un état second, libérateur : le fameux lâcher-prise. Le flot ininterompu des pensées, pernicieux et stérile, se tarissait quelque peu. C'était un réel soulagement que tout impétrant ne songeait plus ensuite qu'à réexpérimenter. On avait l'impression de faire partie d'une caste de privilégiés qui connaissait le moyen de se débarrasser de la douleur, qu'elle fut physique ou morale. Bref, on touchait à l'essentiel.
Pierre Chancel venait au dojo depuis trois ans. Pourtant, malgré son expérience, il souffrait encore de cette position contraignante qu'il devait garder durant les deux méditations d'une demi-heure chacune. Ses genoux et son dos lui faisaient mal. Et ses pensées le tourmentaient de plus belle.
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