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Citation de Danieljean


27 Janvier 1904. – À 8 heures du soir, nous avons appareillé quittant la baie Orange et nous dirigeant vers le Sud. Notre court séjour dans ce coin perdu a été comme une sorte de transition entre la vie civilisée et le monde nouveau et désert vers lequel nous nous dirigions. L’Expédition commence pour de bon et les pensées qui, depuis de longs mois, ne m’ont pas quitté, se pressent et m’assaillent avec plus de force et de ténacité que jamais.
Réussirons-nous ? Et parviendrons-nous à justifier la confiance de ceux qui nous ont soutenus et aidés ? C’est une dure partie que nous jouons et les critiques si largement prodiguées au départ le seront encore plus au retour si nous revenons bredouilles.
Il ne s’agit même pas ici de « vaincre ou mourir », il faut à tout prix réussir, car notre perte même justifierait tout ce qui a pu être dit et ne compenserait pas les sacrifices consentis. Si l’Expédition revient, combien, hélas ! de ces braves compagnons maintenant si pleins de vie et d’ardeur, si heureux de se lancer dans les aventures de l’inconnu, répondront alors à l’appel ?
C’est une formidable responsabilité que j’ai assumée, et dont je sens plus aujourd’hui que jamais le poids énorme ; j’ai seulement un but à atteindre, mais encore dois-je y parvenir en ménageant les dix-neuf existences de ceux qui m’accompagnent.
Mes collaborateurs sont décidés et travailleurs, l’équipage admirable, plein d’enthousiasme, comme le prouve ce souhait du 1er janvier fait en me serrant la main : «… que vous nous emmeniez très très loin, plus loin que les autres ». Nos vivres, nos approvisionnements en général sont abondants et supérieurs à ceux de la majorité des expéditions, la coque du bateau est bonne à tous les points de vue, nous sommes suffisamment bien montés pour nos travaux scientifiques, but de l’expédition, mais la voilure, un peu trop petite et mal équilibrée, nous empêche de virer de bord vent debout, et la machine, déjà beaucoup trop faible, me cause de sérieuses inquiétudes sur son bon fonctionnement. C’est bien entendu à moi, et à juste titre d’ailleurs, que seront faits tous les reproches, si quelque accident arrive, et cependant était-ce possible de remettre encore un départ déjà trop tardif ? Était-ce ma faute si, l’argent manquant, j’ai dû agir avec économie ? N’est-ce pas un tour de force d’être arrivé à ce résultat avec les faibles moyens dont je disposais au milieu des ennuis et des entraves qui m’assaillaient dans le temps si court que j’avais devant moi ? C’est déjà bien beau de pouvoir partir enfin, malgré toute la malchance des débuts de l’expédition qui, jusqu’à Buenos Aires, semblait ne pas vouloir nous quitter.
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