J'ai visité, une fois, le pays de Mitsinari, de l'autre coté du monde, avec ses cochons si gros qu'ils portent sur la tête des fers de lance !
Et des maisons en bois, si hautes, avec des toits taillés en oufa loumina, des morceaux du ciel aui aveuglent sous le soleil ! Et sur l'immensité d'eau salée, d'autres maisons flottantes, qui crachent de la fumée en avançant comme l'éclair ! Et dans des maisons spéciales, où tu bois, des esprits chantent dans des boites noires... [...] Les filles, cadenassées dans des habits, marchent en équilibre sur des échasses... Et les hommes se saluent dans les rues en soulevant leur chapeau ! [...] Des policiers armés qui t'obligent à marcher dans les clous. Sans écouter tes orteils ! Une prison aux murs épais, où on t'enferme, sans lumière, des lunes. Parce que tu as déposé ta crotte sur le trottoir ! Avec des règlements plus nombreux que les arbres de la forêt que tu dois connaître si tu ne veux pas mourir de chagrin ! Ce progrès t'oblige à vivre sur la pointe des pieds. Interdiction de chasser et de pêcher sans permis. Que tu obtiens avec du papier. Comment le gagner ? En travaillant ! Ca veut dire rester des heures sur une machine, à accomplir toujours le même geste !
Les mêmes boulons ! Si tu veux pisser ? Lève le doigt ! Demande la permission ! C'est la stricte vérité !
Si tu refuses ce travail de forçat ? Pas de papier, pas de toit, pas de manioc, pas de filles. Le policier te réveille dans la rue à coups de bâton. Le ciel n'est plus ton chapeau ! Les hommes d'en bas sont des arbres déracinés que le vent emporte au diable !
Dans nos montagnes, on respecte l'homme pour son courage à la chasse, à la guerre ! Mais mitsinari nous propose un monde barbare, inhumain ! En bas, nos fils boivent la bière, fument l'herbe magique qui rougit les yeux. Ils égorgent pour voler le papier ! Voilà le monde enchanté de mitsinari !