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Citation de Elbos


Elbos
20 février 2024
Dès lors que l'idéologie libérale est contrainte d'assumer à son tour l'idéal de l'homme nouveau (celui dont l'âme aurait été entièrement « modernisée » par le Marché planétaire), cette frontière perd évidemment sa principale raison d'être. Un libéral conséquent (c'est-à-dire un libéral soucieux de développer jusqu'à son terme logique l'axiomatique initiale) ne peut donc plus se contenter, comme naguère, d'imputer l'échec des entreprises totalitaires à la nature utopique des fins poursuivies. C'est, au contraire, la seule nature inadéquate des moyens employés pour atteindre ces fins, désormais légitimes en elles-mêmes, qui doit, à présent, caractériser leur chute inévitable. […] Cette rusticité évidente des moyens mis en œuvre par les sociétés totalitaires ne doit donc plus conduire les libéraux à contester la rationalité du projet constructiviste lui-même. Dans la nouvelle optique, la seule question qui se pose est de savoir dans quelle mesure le libéralisme intégralement développé pourrait reprendre ce projet historique à son compte et sur des bases enfin réalistes et efficaces. Or sur ce point, l'optimisme de Fukuyama est manifestement total. « Le caractère ouvert des sciences contemporaines de la nature — écrit-il — nous permet de supputer que, d'ici les deux prochaines générations, la biotechnologie nous donnera les outils qui nous permettront d'accomplir ce que les spécialistes d'ingénierie sociale n'ont pas réussi à faire. À ce stade, nous en aurons définitivement terminé avec l'histoire humaine parce que nous aurons aboli les êtres humains en tant que tels. Alors commencera une nouvelle histoire, au-delà de l'humain. » […]
On imagine sans peine l'étonnement d'un Adam Smith ou d'un Benjamin Constant devant un tel dénouement philosophique. Cet étonnement n'est, cependant, pas très différent, en fin de compte, de celui que Gorgias aurait certainement éprouvé en rencontrant Calliclès, son fils spirituel le plus talentueux. À ceci près, naturellement, que Calliclès ne devait son existence philosophique qu'à la puissance logique de Platon, tandis que Fukuyama et ses milliers de clones idéologiques sont à présent aux commandes du monde où nous vivons.
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