Vous me dégoûtez. Même un vieil animal estropié aurait eu droit à plus d’égards. Vous n’êtes qu’une ordure. Une pourriture, même, d’ailleurs vous en avez déjà l’odeur. Je vais vous laisser poursuivre votre calvaire jusqu’à ce que l’on vous euthanasie. Ce sera la pire des vengeances. Je vais vous laisser crever en vous souhaitant d’en baver autant qu’elle a pu en supporter pendant ces quatre jours avant d’être obligée de se jeter par la fenêtre !
Il se replia donc sur un « Notre Père », vestige plus profondément ancré de la période où enfant il servait la messe dans un camp militaire. Après tout, dans ces moments-là, il vaut mieux se mettre bien avec tout le monde. Non loin de ce superbe endroit, ils trouvèrent un resto ouvrier. Partager une tranche de vie du monde extérieur leur fit du bien. Et que ce ragoût de veau avec des mogettes, sorte de cassoulet local, était bon.
C’était une enfant nerveuse qui toute petite avait fait d’impressionnants spasmes du sanglot. La médecine traditionnelle n’avait rien pu y faire, alors ils s’étaient résolus sans trop y croire, à l’emmener chez une rebouteuse et guérisseuse réputée dans toute la région. La salle d’attente était bondée, beaucoup d’estropiés en particulier.
On ne tire pas sur une ambulance, à plus forte raison sur un corbillard ! Tout ce temps passé à espérer une vengeance pour tomber sur cette « chose infâme » qui se croit encore vivante. Il fut obligé de l’aider pour qu’elle puisse s’asseoir à la table en formica jaune.
Il ne savait par où commencer. Il n’osait même pas la regarder.
Il y a de l’argent beaucoup plus qu’il n’en faut et en plus ton père n’avait jamais touché à sa part. C’était « SA » poire pour « TA » soif éventuelle, en quelque sorte. Tu étais un peu dur à une certaine époque, j’ai cru comprendre. Tu lui en avais fait baver mais il était très fier de ce que tu étais devenu.
Quel bonheur de se retrouver dans ce grand bois. Le calme, la lumière si particulière à travers les branches, l’odeur des feuilles en décomposition, le bruit des rameaux que l’on écrase et les douches que l’on reçoit lorsque l’on secoue par inadvertance les branches. Tout cela lui manquait.
L’apercevoir lui faisait chaque fois le même effet, une chaleur intérieure, un bien-être malheureusement très passager. Il avait même honte de ce qu’il était devenu et à chaque fois prenait la décision de cesser ses conneries. Mais cela ne durait malheureusement pas longtemps.
Les belles rencontres ne se provoquent pas, elles arrivent ou pas, c’est tout.
La réaction des gens devant la mort est différente, ils venaient d’en avoir deux exemples, l’acceptation, la fatalité, l’équivalent du Mektoub chez les Arabes, et le refus catégorique bruyant.
Un couple de personnes âgées les suivait. Ils paraissaient plus morts que vivants, plus blanc que blanc, transparents même, comme si plus une goutte de sang ne circulait dans leur corps.