Jean-Marie Ploux

La fin du rôle fondateur, structurant et régulateur de la religion comme telle n'implique pas pour autant la fin de la foi ne des communautés religieuses. Mais la foi n'est plus portée par l'adhésion sociologique au sein des traditions familiales ou des entités territoriales comme les paroisses, elle devient un choix personnel et les communautés sont constituées par la démarche volontaire de croyants alors qu'autrefois c'étaient elles qui faisaient les croyants. Du point de vue proprement spirituel, il est bien évident que les conditions de la foi changent considérablement quand on passe d'une civilisation où l'existence de Dieu va de soi parce qu'il est au fondement de tout, à une autre où son existence est en question ou, plus encore, récusée.

Pour Luther, les choses sont plus radicales. Dans "Une petite instruction sur ce que l'on doit chercher dans les évangiles et ce qu'il faut en attendre", Luther explique que l'Évangile, c'est d'abord l'ensemble des textes du Nouveau Testament, puis il précise qu'il ne faut pas considérer "les évangiles et les épîtres comme des livres de lois dans lesquels on doit apprendre ce qu'il faut faire et où l'oeuvre du Christ nous est simplement montrée en exemple". Autrement dit, il ne sont pas des livres de morale ou des recueils de sentences pour un humanisme chrétien. Tant qu'on en reste là, dit-il, "on reste païen comme avant".

Si la démarche de Descartes se résumait en trois mots: douter, démontrer, savoir, celle de Pascal s'énonce ainsi: "Nier, croire et douter". Nier tout ce qui ne tient plus en ces temps de Modernité. Croire, nous allons voir quel chemin Pascal emprunte pour y conduire. Mais, ensuite, douter! C'est-à-dire faire travailler la raison critique afin de ne pas tomber dans le fanatisme ou le fidéisme qui croit sans comprendre.