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Citation de michelekastner


Il me plut de croire qu'Amir s'était coupé les cheveux pour moi. Il devait savoir que la chimiothérapie provoquait la chute des cheveux chez la plupart des patients, même les plus jeunes, lui qui avait réussi à plaisanter sur mon beau crâne chauve. Car mes cheveux étaient en effet tous partis dès les premières séances à l'institut Curie. Une humiliation de plus, après les visites au Cecos, et j'avais du mal à m'habituer à ce visage anguleux et dur que me renvoyait le miroir. Mon corps était devenu un objet de spéculation pour les médecins : d'abord, la qualité de mon sperme, ensuite, ma résistance au traitement et, enfin, le nombre de cellules malignes. J'étais réduit à des chiffres, des bilans et des statistiques. Simon Weber n'existait plus - un gliome avait pris sa place. Aux yeux de mon père, qui s'efforçait de comprendre cette succession de chiffres et de résultats qu'on lui présentait pour lui donner courage, c'était une tout autre épreuve, je le sais. La bataille se livrait à l'intérieur de mon corps, en-dehors de son champ d'action, et il était réduit à y assister en spectateur impuissant. Mais pire que cette passivité devait être le sentiment que tous ses efforts depuis des années, exclusivement tournés vers un seul but - ma réussite - allaient s'avérer vains, dérisoires. Je ne risquais plus de le décevoir en échouant dans mes études, non, l'écroulement était bien plus radical. Je risquais tout simplement de disparaître et de ke laisser seul avec ses projets pour moi. Depuis la mort de ma mère, il avait voulu prouver à la terre entière que son éducation à elle seule ferait de moi un être exceptionnel.
Il avait oublié que la maladie n'en avait cure, des êtres exceptionnels.
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