AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de ILESTMIDI


Je connais peu de bonheurs aussi intenses que celui que procure la sensation de froid au coucher. On se recroqueville, on tremble, on se pelotonne. On expulse le froid par-devant, il revient dans les reins. Il est brutal ou insidieux, mordant ou humide, mais c'est toujours la même lutte, la même lutte que dans l'enfance, la même lutte si intimement liée à l'acceptation de la solitude. Au début elle est âpre, puis on se fait une sorte de bulle tiède. Et ce coton glacial dont le simple contact nous saisissait des pieds à la tête se transforme en une extension de nous-même. On repasse par la position fœtale, on enfouit sa tête entre nos bras, on respire en circuit fermé, avant de se délier ensuite, et de boire à nouveau l'air du dehors. L'ébranlement nerveux suscité par le froid me mettait chaque soir dans une sorte de transe joyeuse. Je claquais des dents tout en sentant le réchauffement à l'œuvre. Je luttais en sachant que je ne pouvais pas perdre tant que j'aurais un abri et un tissu dont envelopper mon corps. Affrontement primitif, a priori sans vainqueur et sans gloire, dont je ne cernais pas très bien l'enjeu. Rire de tout le corps, frisson d’enfance.
Ce combat joyeux contre le froid « extérieur » n’a pourtant rien à voir avec la crainte que procure le froid « intérieur », celui qui semble venir du plus profond de nous-même. Ce dernier nous prend le soir, après s’être lavé à l’eau froide par exemple. Il ne survient pas immédiatement, il dort une demi-heure, tapi dans nos os, et s’empare d’un coup de tout le corps, dans un grand frisson essentiel. Sur le moment l’attaque est si violente que l’on panique, on se demande si on va pouvoir jamais se réchauffer, si la source est encore assez vive. Autant j’aimais le froid extérieur, autant le froid intérieur me faisait peur.
Commenter  J’apprécie          10









{* *}