L’eau ne cesse
L’eau ne cesse
d’user l’eau
Les vagues lourdes
défont les sables
Les ténèbres
nous pressent
À mots limés
souffrons ces choses.
Tel sera le voyage
Tel sera le voyage
qu’innocent convoite
et rêve d’accomplir
Un bastingage odorant
de lectures serrées
L’avant et l’après
à jamais confondus.
L’orage
L’orage tournant
viennent à nous
plumes écartelées
tant d’oiseaux
Ou bien tant
de pages blanches.
Je dois maintenant
désormais je dois
serrer mes lignes
que nul n'en sorte.
Ne plus refuser
le nom et sa voix
ne pas recouvrir
la pierre reverdie.
Loi des heures
passant noircies,
la parole amputée
l'art du silence.
Et la peur d'arracher
un mot au marbre
un soupir à l'ombre
un cheveu au sommeil.
20.12.93.
À nuit létale
À nuit létale
un vent bouclé
Qui dit (mais
sur quel luth ?)
L’étroit ruisseau
des colportages.
Bergers
Bergers, ils regardent
les navigations revenir
où est l’heure
où est l’ici?
Demain le poil blond
aura blanchi
À l’horizon soudé
l’air fermera ses portes
Ainsi se referment
sous l’océan des herbes
le livre et le vallon.
(…) Il faut laisser la voie lactée
s'engouffrer dans les places publiques
tandis que chante la blonde fontaine (…)
Regarde, nos mots familiers
funambulent désespérément
dans leur prison de salive (…)
Je ne suis pas ici
ici n'est pas
il n'y a pas d'ici
si ici était
je ne pourrais
marcher
ni faire paroles
ici est prétexte
dire : je pars
est mensonge
Il y a tant d'ici
qu'aucun ici n'est
et ne s'arrête
mais volatil
on ne l'attrape
ni s'y couche
ou s'endort
ici est un mot.
17.06.93.
Sert à ça…
Sert à ça
le naturel modèle
torsion des poumons
paille et gravier.
Mais la nuit
pénètrera ce corps
pour l'émerveiller
qui s'endort
se lève.
[…]
Je partage ma damnation comme un melon captif
de sa forme et de ses graines, comme la terre captive
de ses continents, je partage mon temps en descendant
loin du soleil par les plantes prisonnières au cœur libre
des pierres, au sud de la mer.
Ou bien ne pas aller…
Ou bien ne pas aller
plus avant
que cet illustré
des premiers matins
avec une feuille
de douceur
entre les pages.
J'entends, né
d'une mère étroite,
puis conservant
l'étroit
en toute aventure.
Enfermé…
Enfermé
dans ce qui commence,
une seule journée
dans les mains.
L'écrit
qui a reçu titre
et arpent
ne peut être
qu'instant.
Difficile
de marcher
avec ces mots
dans l'épaisseur.