Il semblait être dans la nature des Aspreval de plaire aux femmes et de les faire
souffrir.
Il s’adressait à elle comme à une divinité qu’il voulait se rendre favorable par des cadeaux, des fleurs, des attentions, des paroles flatteuses. Il donnait une importance extraordinaire à ses moindres désirs, à ses goûts, à ses caprices. Un soir où, fatiguée et aussi parce qu’elle ne voulait pas le voir trop souvent, elle avait refusé de dîner avec lui, on apporta à sept heures, d’un des restaurants les plus réputés de Paris, un entremets au chocolat que Marianne avait trouvé bon la veille. « Pour vous obliger à penser à moi au moins au dessert », disait un billet joint à l’envoi.
Mon père, à qui elle avait confié son désir de s’occuper, l’a prise dans le laboratoire de produits pharmaceutiques qu’il avait créé, et, aidée par son esprit précis, stimulée par son amour de l’argent, elle est devenue directrice commerciale de l’affaire. Je me trouvais en Afrique du Nord quand mon père est mort, et tout naturellement elle l’a remplacé. Vous pensez qu’à mon retour j’ai été trop heureux de lui faire un pont d’or pour qu’elle continue à diriger une affaire qui m’appartient. Cette solution nous donne à chacun ce que nous aimons : à elle l’argent, à moi la liberté.
— Vous apprendra quoi ?
— A me moquer des gens qui soutiennent avoir éprouvé le fameux coup de foudre. J’ai toujours prétendu que je n’y croyais pas, que c’était un mensonge ou une explication inventée après coup par les poètes. Et dès que vous êtes apparue, Mary-Lou, si frêle, si blonde, avec cette bouche un peu triste, ces hauts sourcils de danseuse, ces yeux dont j’aimerais passer des heures à chercher la couleur exacte, j’ai eu tout de suite envie d’entendre votre voix, de vous prendre dans mes bras, de vous voir sourire – oh ! mieux que vous ne le faites en ce moment.
C’est parmi les oisifs que se recrutaient autrefois les explorateurs, les amateurs d’art, les philanthropes, et ces grands amoureux qui faisaient le bonheur des femmes.
La carrière de professeur ne correspondait pas à mon goût de l'imprévu, des
voyages ; l'édition, la publicité étaient encombrées, le journalisme encore
plus.
L'illustration compte autant et peut-être même plus que le texte, dans un numéro de prestige,et les écrivains n'ont pas forcément le sens de l'image. Pourquoi ne pas chercher parmi les metteurs en scène de cinéma ? Après tout, la mise en page,la composition, cela s'apparenterait plus au spectacle qu'à la littérature.
Trop de danses, trop de café, trop d’émotions me jetaient dans une étrange exaltation. Rien dans cette nuit ne me semblait réel. Parfois ma jupe de tulle s’accrochait à une branche, comme pour me retenir et je m’attendais presque à voir une fée surgir au détour d’une allée pour me métamorphoser en pierre.
Et dans ces pages que j'écris pour me soulager, pour voir plus clair en moi, il
faut bien que j'en arrive aux raisons qui m'ont fait détester le marquis d'Aspreval, même si cela m'oblige à revivre les heures les plus pénibles, les plus humiliantes de ma vie.
Pourquoi m'avoir parlé de coup de foudre, proposé de le rejoindre à Rome, pourquoi m'avoir embrassée avec tant de fougue s'il s'agissait pour lui d'un simple flirt, alors qu'il se préparait à une flatteuse alliance, utile à sa carrière de surcroît ?