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Citation de alzaia


III Gwenn ha Du

Je me souviens du chant qu'ils entonnaient
en rentrant du pub, The Woodside, mes oncles et cousins,
noircis par les mines et les chantiers navals, enveloppés par la fumée,
criant à tue-tête dans les rues et venelle assoupies par la pluie,
pour entendre l'écho que renvoyaient les pierres
comme un sentiment de déjà-vu

Ce qu'ils cherchaient alors
c'était un nouveau départ,
le noir qui fait naître le blanc, le blanc dans le noir,
une âme plus ancienne, arraché à la chair et à l'os,
pour poursuivre le vieux récit des hommes sous forme de chant,
la joie sauvage des cornemuses, souvenirs païens,
une foule de parents qui émergent de la mer,
une demeure qui se profile dans le brouillard
pour devenir un foyer.

Je songe à présent à leur amour désincarné,
à ce réflexe animal que je partage avec eux, dans les nerfs et les os,
à quelque chose d'impérieux s'efforçant de surgir des veines,
à un territoire saint : le dur quotidien;
puits de mine et docks, ports et prairies,
la brèche dans la haie, le murmure du cours d'eau,
un arpent de brouillard et de ronces où ce que j'ai perdu
a ressurgi sous une forme différente, éveillant à peine un souvenir.

Il n'y a nulle permanence ici ; (...)
c'est le territoire saint, où il n'arrive rien,
un lieu que l'on peut prendre pour un foyer, quand on comprend
qu'on ne peut le détenir,
qu'on ne peut ni le prendre
ni le donner;
aigrettes et cormorans, ibis, oiseaux et échassiers de la côte,
la touriste japonaise, la fille du bar de la plage,
les fantômes du clan et les saints modernes, ceux qui sont désignés
gardiens du chant et de la guerre, les morts impertubables :
tout passe par là - et ce passage
que nous tenons désormais pour sanctuaire.

Et parfois,
il n'arrive rien :
le monde qui se retirait revient sur lui-même,
une bourrasque de vent, un bagad dans une ruelle,
des voix d'enfants
rassemblées dans un cyprès;
ce qui importe à présent, ce n'est pas le récit,
ce qui importe, ce n'est pas l'évènement, mais l'ourlet effiloché
ce qui importe, c'est le point où rien n'a d'importance :
la brèche dans la haie,
un arpent de brouillard et de ronces,
et comment le sacré - dur quotidien -
nous revient dans les chants et les superstitions,...
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