"Notre maison" de Joël Sadeler.
Il suffit de poser les mots
Bord à bord
En suivant le fil à plomb
De l'inspiration
Et le mur de la poésie se construit
Enjambement de briques
Ciment symétrique
La truelle rattrape
La rime qui dérape
Lisse l'adverbe rebelle
Et l'épithète qui fait la belle
Le poète est un maçon
Qui du mot fait une maison
Ouverte dans tous les sens
Et à tous les visiteurs du bonheur...
Tu me grondes parce que j'ai les doigts de toutes les couleurs
Noir-polar
Ou jaune-sable des squares
Parfois blanc-banquise
Ou rouge-révolution
Et même bleu-contusion
Tu me grondes et tu te trompes,
Mes doigts je les ai trempés dans l'amitié
Des mains des enfants du quartier
Des enfants du monde entier
Tu me grondes
parce que j’ai les doigts
de toutes les couleurs
noir-polar
ou jaune-sable des squares
parfois blanc-banquise
ou rouge-révolution
et même bleu-contusion
Tu me grondes
et tu te trompes
mes doigts je les ai trempés
dans l’amitié
des mains
des enfants
du quartier
des enfants
du monde entier
Dans le ciel défile
le peloton des nuages
maillots gris
maillots blancs
maillots noirs
soudain l'échappée du soleil
maillot jaune
L'institutrice
Ma plus tendre enfance. Un de mes tout premiers souvenirs, celui qui s'attache à mon institutrice.
J'avais quatre ans. Elle était merveilleusement belle. J'en étais follement amoureux.
C'est mon père qui l'a épousée.
Jean l'Anselme.
EXPLIQUE-MOI...
Aux maîtres à penser
ne préfères-tu pas les maîtresses à
rêver ?
Jean Lor
Je caresse la mappemonde
Je caresse la mappemonde
Jusqu’à ce que sous mes longs doigts
Naissent des montagnes, des bois,
Et je me mouille en eau profonde
Des fleuves, et je fonce avec eux
Vers l’océan vertigineux
Débordant de partout mes yeux
Dans la fougue d’un autre monde.
(Jules Supervielle)
La poésie de juin
Je n’oublierai jamais la poésie de juin
sous les hauts tilleuls de l’école
Les moustaches du chat
sur l’hémistiche de Char
Le vent qui décoiffait la rime
se perdant sur le toit
Au-dessus de la haie des lauriers-palmes
le clocher de l’église attentif à nos âmes.
Et le cadran solaire
corrigeant les fautes de temps
Je n’oublierai jamais la poésie de juin
la poésie sous les tilleuls
ce n’était pas de la tisane…
La bouteille d’encre
D’une bouteille d’encre,
On peut tout retirer :
Le navire avec l’ancre,
La chèvre avec le pré,
La tour avec la reine,
La branche avec l’oiseau,
L’esclave avec la chaîne,
L’ours avec l’Esquimau,
D’une bouteille d’encre,
On peut tout retirer,
Si l’on n’est pas un cancre
Et qu’on sait dessiner.
Dommage
Dommage que la pluie survienne
quand déjà on a l'âme en peine
Dommage que la mer s'en aille
quand on veut aller à la baille
Dommage que le vent se lève
et décoiffe nos plus beaux rêves
Dommage de voir ses amis
partir loin pour une autre vie
Mais
Heureusement que notre cher été
est exact au rendez-vous de l'année
Et que l'automne bichonne en secret
ses champignons et ses marrons grillés
Que l'hiver ramène le blanc sur la terre
et dans la barbe de Noël le Père
Heureusement que le printemps rieur
nous sourit toujours de toutes ses fleurs