Au cours de ces deux ans, Claire eut le temps de s’habituer à ce que le miroir fasse partie de sa vie. Elle en arriva à croire qu’elle n’aurait jamais accès au monde qu’il lui faisait voir – ce monde tellement plus éclatant, plus coloré, plus magnifique que le sien. Elle était déçue, bien sûr, mais elle en acceptait maintenant l’idée. Que faire d’autre, d’ailleurs ? En attendant, elle s’estimait heureuse d’avoir le privilège et le plaisir – secret – de pouvoir y plonger les yeux quand bon lui semblait. Elle le rangeait, enveloppé avec soin d’un morceau de velours vert, dans le tiroir de sa table de chevet.