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5/5 (sur 5 notes)

Nationalité : Brésil
Né(e) à : Recife, Pernambouc , le 09/01/1920
Mort(e) à : Rio de Janeiro , le 09/10/1999
Biographie :

João Cabral de Melo Neto est un poète et diplomate brésilien.

Né dans une famille riche, attentif à la condition des habitants pauvres du Brésil, diplomate longtemps en poste en Espagne, il a su utiliser ses contradictions, son sens de l’observation, ses connaissances en matière d’architecture et son goût du baroque pour élaborer une poétique qui s’est démarquée des courants dominants de son pays.

Il obtient son premier poste diplomatique en 1946. João Cabral parcourra le monde : Espagne, Angleterre, France, Suisse, Belgique, Portugal, Équateur, Sénégal. À Barcelone il se lie avec les artistes d'avant-garde, Joan Miró, Antoni Tàpies. Dans l’exercice de ses fonctions, cet écrivain voyageur va ainsi arpenter les territoires, il va scruter les gens, questionner les limites, dessiner les mondes, les paysages possibles…

"Pedra do Sono" ("Pierre du sommeil"), son premier recueil, écrit entre 1940 et 1941, est publié en 1942. Il a publié dix-neuf livres entre 1947 et 1999.

Innovateur reconnu comme un maître de la jeune génération concrétiste, Cabral ne sacrifie pas pour autant à l'avant-garde. Sensible au surréalisme dans son premier livre, il va vite se "libérer de sa diction nocturne et morbide". Ses références sont Le Corbusier, Mondrian, le cubisme. "O Engenheiro" ("L'Ingénieur", 1945), poésie sèche, en mètres courts non rimés, sans effusion sentimentale ni discursivité rhétorique, traduit cette "Éducation par la pierre" ("A Educação pela Pedra", 1966), ascétique, austère, dominée.

Lauréat du prix Camões en 1990, il est un des plus grands poètes de la littérature contemporaine et, sans doute, un des plus importants de la production littéraire brésilienne. Atteint de cécité sur ses vieux jours, il cesse alors d'écrire.

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João Cabral de Melo Neto
Sur ce papier
  
  
  
  
Sur ce papier
ton sel peut
se faire cendre ;
ou le citron
devenir pierre ;
le soleil de la peau,
le blé du corps
devenir cendre

(Aussi redoute
le jeune matin
sur les fleurs
de la veille).

Sur ce papier
bientôt se fanent
les mauves, tièdes
fleur morales ;
toutes les fluides
fleurs pressées ;
toutes les humides
fleurs du rêve.

(Aussi, attends
le jeune matin
qui te révèlera
les fleurs de la veille).


/ Traduit du portugais par Michel Riaudel
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João Cabral de Melo Neto
Comment la mort s'infiltre

Un jour il ne se lève pas
parce qu'il veut rester au lit.

Un autre jour, il dit pourquoi :
c'est que l'un de ses pieds lui fait mal.

Un autre jour, que la jambe lui fait mal,
Et qu'il ne peut s'appuyer dessus.

Jour après jour, un non grandit en lui,
à se tortiller comme un chien.

Jour après jour, il trouve la position
qui lui pèse le moins dans son lit.

Un jour il fait fermer les fenêtres:
au-dehors le jour lui fait mal.

Il y a un jour où il ne se lève pas
et il reporte à la semaine prochaine,

Une autre semaine et il reporte encore,
pourquoi devrait-il se précipiter.

Un jour il a passé vingt-quatre heures.
sans se soucier de l'extérieur.

Un autre jour il n'a plus distingué
le jour de la nuit, tout était vide.

Un jour, il s'est mis à penser : respirer,
c'est un effort qu'il vaut mieux éviter.

Qui l'abandonna, le souffle ?
Changement de lit. Voilà son cercueil



Como a Morte se Infiltra

Certo dia, não se levanta
porque quer demorar na cama.

No outro dia ele diz por que:
é porque lhe dói algum pé.

No outro dia o que dói é a perna,
E nem pode apoiar-se nela.

Dia a dia lhe cresce um não,
um enrodilhar-se de cão.

Dia a dia ele aprende o jeito
em que menos lhe pesa o leito.

Um dia faz fechar as janelas:
dói-lhe o dia lá fora delas.

Há um dia em que não se levanta:
deixa-o para a outra semana,

Outra semana sempre adiada,
que ele não vê por que apressá-la.

Um dia passou vinte e quatro horas
incurioso do que é de fora.

Outro dia já não distinguiu
noite e dia, tudo é vazio.

Um dia, pensou: respirar,
eis um esforço que se evitar.

Quem deixou-o, a respiração ?
Muda de cama. Eis seu caixão
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João Cabral de Melo Neto
Cultiver le désert
  
  
  
  
Cultiver le désert
comme un verger à l’envers.

(L’arbre distille
la terre, goutte à goutte ;
la terre complète
tombe, fruit !

Tandis qu’en l’ordre
d’un autre verger
l’attention distille
un verbe mûr).

Cultiver le désert
comme un verger à l’envers :

alors, plus rien
ne distille ; n’évapore ;
où fut la pomme
reste une faim ;

où fut un mot
(poulains ou taureaux
contenus) reste la sévère
forme du vide.


/ Traduit du portugais par Michel Riaudel
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Nous sommes de nombreux Sévérinos
pareils en tout dans la vie :
la même grosse tête
qui s’équilibre péniblement,
le même ventre enflé
sur les mêmes jambes fines,
et pareils aussi parce que le sang
qu’on utilise est peu épais.
Et si nous sommes des Sévérinos,
pareils en tout dans la vie,
nous mourons d’une mort pareille,
de la même mort séverine :
cette mort dont on meurt
de vieillesse avant trente ans,
d’embuscade avant vingt ans,
de faim un peu chaque jour.

(p.21)
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Depuis que je migre
je ne vois que la mort d’active
je n’ai croisé que la mort
parfois même une mort festive ;
il n’a trouvé que mort
celui qui pensait y trouver vie,
et le peu qui n’était pas mort,
c’était une vie sévérine
(cette vie qui est moins vécue
que défendue,
qui est encore plus sévérine
pour l’homme qui migre)

(p.45)
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Elle est de fruit, ta texture
et ainsi, concrète ;
une texture dense que la lumière
ne traverse pas.

Sans transparence :
non telle l'eau claire, mais
tel le miel, intense.

Elle est intense, ta texture
mais non aveugle ;
telles les choses qui ont leur lumière
propre, interne.

Et tu as une carnation
identique au miel de la canne
et la lumière brune.

Tu possèdes d'internes
et lumineux cristaux
identiques à ceux de l'air que l'été
utilise en septembre.

Et il y a dans ta peau
le soleil des fruits que
l'été apporte au Nordeste.

Elle est d'un fruit du Nordeste,
ton épiderme ;
elle en a la même carnation dorée,
solaire et joyeuse.

Des fruits mûris
dans le Recife lavé
de ses brises.

Des fruits de Recife,
de leur famille,
tu as le bois ravisseur
qui est bien plus riche.

Et le même dur
moteur animal qui pulse
pareil à un pouls.

D'un fruit du Pernambouc
tu as l'animal,
des fruits presque animaux
et la chair charnelle.

Et aussi ceux
d'une mesure plus juste,
meilleure recette.

Ton enchantement,
c'est ta mesure,
de fruit du Pernambouc,
toujours concis.

Et ton secret,
ton corps, d'autant plus juste
qu'il est tendu.

Tu as d'un fruit cette
taille juste;
pas de tous les fruits,
de ceux du Pernambouc.

Les mangues, les mangabees
de Recife, qui sait
le mieux les dessiner.

Tu es un fruit mesuré,
bien dessiné;
en tout différent de la jacque,
du génipape.

Tu n'es pas une chose aqueuse
ni un fruit que l'on verse
vague et sans forme.
Ton enchantement,
c'est ta mesure,
de fruit du Pernambouc,
toujours concis.

Et ton secret,
ton corps, d'autant plus juste
qu'il est tendu.

Tu as d'un fruit cette
taille juste ;
pas de tous les fruits,
de ceux du Pernambouc.

Les mangues, les mangabes
de Recife, qui sait
le mieux les dessiner.

Tu es un fruit mesuré,
bien dessiné;
en tout différent de la jacque,
du génipape.

Tu n'es pas une chose aqueuse
ni un fruit que l'on verse
vague et sans forme.

Tu es dessinée au crayon
à la pointe fine,
comme la canne à sucre,
qui n'est qu'une ligne pure.

Et qui émerge, exacte,
de la confusion multiple
de sa propre paille.

Tu es aussi élégante
qu'un pied de canne,
qui dévêt sa jambe nue
de l'intérieur de la paille.

Et ta jambe est faite
du même métal sain
que la canne svelte.

Tu possèdes le même métal
de canne, poli et luisant,
et aussi celui de l'oïti,
qui n'est que fibre.

Mais profonde,
tant de fibres à défaire
muqueuse et humide.

De la pitombe, tu possèdes
la qualité muqueuse,
lorsque de ta chair
elle sécrète.
Et aussi de l'ingá,
de sa mousse fraiche à la dent
et au pouce.

Tu n'es pas un fruit fruit
fait pour la dent,
ni un fruit fleur,
pure odeur.

Un fruit complet :
pour tous les sens,
pour le lit et pour la table.

Tu es un fruit multiple,
mais simple, logique;
tu n'as rien de métaphysique
ou de la métaphore.

Tu n'es pas le Fruit
et je ne te vois pas non plus
comme la Graine.

Je ne te vois pas en graine,
future et enceinte ;
et non plus en vitamine,
en de chastes gélules.
En toi je vois seulement
ce qui se savoure,
non ce qui alimente.
Un fruit qui se savoure,
non qui alimente
ainsi, je décris mieux
ton urgence.

Cette urgence
du fruit qui nous invite
à nous fondre en lui.
Tu as l'apparence facile,
engageante,
du fruit très sucré,
qui attire les fourmis.

Et tu as l'attrait
de la sapote et de la sapotille
qui attirent les chauves-souris.
Au fruit, ton attirance
est identique ;
tu as du fruit l'attirance
droite et sans défense.

Toujours si forte
dans la chair et l'omoplate nue
du fruit jeune.
Tu es un fruit à la chair jeune
et à l'âme allègre,
différente de l'oïti-coró
par le piquant.

Et, tamarin,
celui qui te connait
a les dents plus fines.
Tu es un fruit à la chair acide,
chair et âme ;
différente de la papaye,
triste et stagnante.

C'est du nerveux cajá
que tu as le goût
et le nerf à vif.
Tu es un fruit à la chair ardente,
toujours âcre
comme les araçás, les guabirabes,
les maracujás.

Également mangabe,
celui qui te connaît
en est visqueux, gommeux.
Tu n'es pas un fruit que le temps
ou un verre d'eau
lave de notre bouche
comme un rien.

Jamais pitangue,
qui lave la langue
et étanche la soif.
Tu accrois la soif comme
un fruit mûr
qui se corrompt déjà
dans son sucre.

Acide et verte:
mais, celui qui te connait
n'en a que plus soit.
Acide et verte, mais
tu annonces déjà
le sucre mûr que
tu auras un jour.

Et ton charme vient
de la légère saveur de pourri
dans ta chair jeune.
Au goût propre du cajou,
de plage et de soleil,
tu réunis celui de la mangue morbide,
ombre et langueur.

Tu les connais toutes les deux
dans tes contrastes de fruit
du Pernambouc.
Sans doute, tu es vraiment un fruit
du Pernambouc :
le corossol, la mangabe
et certaines mangues.

Elles ont tant de sucre
que même vertes encore elles semblent
déjà corrompues.
Tu es ainsi un fruit vert
et pas tout à fait vert,
c'est ainsi que je te vois
depuis toujours.

Et l'on comprend bien
que certains te disent pourrie et d'autres
te disent verte.
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João Cabral de Melo Neto
Ourdir le matin
1
Un coq isolé n'ourdira pas le matin:
il aura toujours besoin d'autres coqs.

De celui qui attrape le sien cri
et l'envoie à un autre; d'un autre coq
qui attrape le cri du coq précédent
et l'envoie à un autre; et d'autres coqs
qui avec bien d'autres coqs s'entrecroisent
aux rayons du soleil de leurs cris de coq,
de telle sorte que le matin s'ourdissent
comme une mince toile entre tous les coqs.

2
Et si la toile prend corps, d'entre tous,
Une tente s'érige, où tous ils entrent,
Ainsi s'emmêlant tous, comme une bâche
(au matin) elle plane libre et sans armature.

Au matin, banne d'un tissu très aérien
qui s'étoffe et s'élève du sol : montgolfière.


https://lyricstranslate.com/fr/tecendo-manh%C3%A3-ourdir-le-matin.html

Tecendo a manhã
1
Um galo sozinho não tece uma manhã:
ele precisará sempre de outros galos.

De um que apanhe esse grito que ele
e o lance a outro; de um outro galo
que apanhe o grito de um galo antes
e o lance a outro; e de outros galos
que com muitos outros galos se cruzem
os fios de sol de seus gritos de galo,
para que a manhã, desde uma teia tênue,
se vá tecendo, entre todos os galos.

2
E se encorpando em tela, entre todos,
se erguendo tenda, onde entrem todos,
se entretendendo para todos, no toldo
(a manhã) que plana livre de armação.

A manhã, toldo de um tecido tão aéreo
que, tecido, se eleva por si: luz balão.
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Poésie, je t'écrivais :
fleur! sachant que
tu es excrémet.
Excrément banal,

qui engendre des champignons
(de rares et fragiles champignons)
dans l'humide chaleur
de notre bouche.

Délicat, j'écrivais :
fleur! (Les champignons,
sont-ils des fleurs? Une espèce
étrange, une espèce

éteinte de fleur, une fleur
pas tout entière fleur,
mais une fleur, une cloque
ouverte dans ce qui a mûri.)

Délicat, j'évitais
le fumier du poème,
sa tige, son ovaire,
ses intestinations.

J'attendais les pures
et transparentes floraisons,
nées de l'air, dans I'air,
comme les brises.

-

Puis, je découvrais
qu'il était permis
de te nommer : fleur !
(Par vos circonstances

identiques ? Vos gentilles
substances ? Vos douces
carnations ? Par les
vergers vertueux

de vos évocations ?
Par la pudeur du vers
-une pudeur de fleur-
par sa délicate

pudeur de fleur,
qui n'éclôt
que lorsque le sommeil
du jardinier l'oublie ?)

Puis je découvrais
qu'il était permis
de te nommer : fleur !
(fleur, une image

à deux pointes, comme
une corde). Puis
je découvrais
les deux pointes

de la fleur; les deux
bouches de l'image
de la fleur la bouche
qui mange le mort

et la bouche qui orne
le mort avec un autre
mort, avec des fleurs,
des cristaux de vomi.
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On assiste dans sa danse
au même processus de l'épi :
vert, enveloppé de paille ;
mûr, presque nu.

On dirait que sa danse
lorsqu'elle est dansée, à mesure
qu'elle avance, la dépouille
du feuillage qui l'habillait.

Pas seulement de la végétation
qui l'habille lorsqu'elle danse
(des jupes feuillues et rugueuses
qu'on appelle au Brésil chita)

mais aussi de cette autre flore
à laquelle ses bras donnent vie,
dense forêt de gestes
à laquelle ils donnent vie et supplice.

En vérité, même si tout
ce qu'elle porte sur elle,
même si, de fait,
cela l'habille toujours,

cela semble perdre peu à peu
son opacité antérieure
et, comme la paille qui sèche,
l'entrouvre peu a peu.

Ou alors, c'est que ce feuillage
devient peu à peu imperceptible :
car, la danse achevée,
bien que ses habits persistent,

l'image que la mémoire
conservera dans son œil,
c'est de l'épi, nu et grandi,
Perçant et svelte, en épi.
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Pourquoi la même pudeur
à écrire qu'à déféquer ?
On n'a pas de pudeur à manger,
à boire, à incorporer,
et souvent il y a plus de pudeur
à demander qu'à donner.
Alors pourquoi celui qui écrit,
si écrire, c'est après tout donner,
évite-t-il d'être entouré de gens
et préfère-t-il s'isoler ?

Ecrire, c'est être à l'extrème
de soi-même, et celui qui
s'exerce ainsi, dans cette
nudité, la plus nue des nudités,
a de la pudeur que d'autres voient
ce qu'il a de grimaces,
de tics, de gestes manqués,
de peu spectaculaire
dans la vision torse d'une âme
au moment même où elle crie son råle.

(Mais le plus curieux
dans la pudeur de l'écrivain
c'est que la pudeur de faire
est une impudeur à publier :
en effet, la pudeur fait alors
que l'on s'exhibe, que l'on se démontre,
même ceux qui n'exercent pas
métier de confesseur
ne le font pas pour s'exposer,
mais pour donner à voir ce qu'il y a.)
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