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3.67/5 (sur 15 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Julie Léal a coécrit plusieurs comédies et créé trois spectacles pour un très jeune public.

"Vivre, tout simplement" (2019), son premier roman, est suivi de "Entre ciel et terre, les chemins de traverse" (2020).

Julie Léal vit au Canada

page Facebook : https://www.facebook.com/Julie-L%C3%A9al-355987541796227/?ref=page_internal

Source : amazon
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
À trente-quatre ans, je regardais passer la vie. Je n’attendais plus rien et j’avais l’impression que plus rien ne m’attendait. C‘était un peu comme si j’étais en train de … mourir de l’intérieur. Douce ironie. À ce rythme-là, j’allais finir par ressembler aux gens que je mettais en terre. En beaucoup moins serein.
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— Nicolas, je sais que tu aimerais bien, mais la machine à tickets va pas se recharger seule… Nicolas ? Ouh, ouh ! C’est pour aujourd’hui ou pour demain ?
Je sursaute. Je n’ai pas compris sa question. Il y avait bien une question, non ? Une légère panique me saisit. En réalité, je dormais. J’ai cette faculté incroyable de pouvoir dormir n’importe où, les yeux ouverts, sans rien laisser paraître. Je semble absorbé par mon travail, mais en fait, je suis ailleurs, dans un monde sans distributeur de tickets, où Firmin n’existerait pas.
Firmin. Le bonhomme grassouillet qui se tient devant moi, l’air ronchon. Ce petit être insignifiant qui se prend pour mon chef, juste parce qu’il a dix-huit ans d’ancienneté et dix ans de plus que moi. Je le laisse faire parce que ça m’est égal. Si ça lui fait plaisir… Ne rien laisser paraître. Surtout ne pas faire de vagues.
J’émets un léger grognement qui ressemble à une réponse et me lève, non sans mal. Je dormais vraiment bien. Firmin a raison, même si ça me fait mal de le reconnaître. Le distributeur affiche l’habituel message : « Cet appareil est actuellement hors service », signifiant qu’il est grand temps de le recharger. Je pars chercher le matériel nécessaire dans la réserve et en reviens les mains pleines. Retroussant les manches, je me mets au travail pour nourrir la bête avaleuse de billets de banque et cracheuse de titres de transport. Au bout de dix minutes, elle émet une sorte de râle, rassasiée. Croyez-le ou non, je suis sûr que cet engin communique avec moi.

Cela fait un an que je travaille ici, au guichet de la station Luxembourg, sur la ligne B du RER. Une station en plein cœur de Paris, à côté du jardin du même nom, non loin du Panthéon où reposent les hommes et femmes qui ont marqué notre histoire. J’aime bien être là. À accomplir ces tâches quotidiennes, dans une routine rassurante. En voyant passer des gens de tous horizons et de toutes origines, unis par un objectif commun : se rendre quelque part ; je me plais volontiers à imaginer d’où ils viennent, où ils vont, quelle est leur vie, le but de leur journée, leur métier, la couleur de leurs sous-vêtements, que sais-je encore. Oui, n’en déplaise à Firmin, je suis un rêveur. Et cette station de métro m’offre un terrain de jeu idéal pour exercer mon activité favorite : m’évader par la pensée.
Voyageurs du bout de la ligne, vous qui marchez sans me voir et sans vous arrêter, sachez que vous passez à côté de tout un monde. Oui, car c’est un petit monde que cette station de métro, avec sa population, son organisation. Une vraie fourmilière. Au sommet de notre pyramide, on trouve M. Turpin, notre supérieur à tous, qui en réalité n’est qu’un maillon infime de cette immense hiérarchie qu’est la RATP. Je crois même qu’on ne trouve aucune trace de lui sur l’organigramme de la société. De nous encore moins. Je l’aime bien, Turpin. Un type droit, je crois. Il supervise plusieurs stations et paraît toujours pressé. Les autres disent qu’il est snob et qu’il se donne des airs importants, moi je crois juste qu’il est tellement stressé qu’il en oublie parfois de dire bonjour… et même de respirer.
Puis il y a Mehdi et Jean-Marc, les agents d’entretien. Eux aussi tournent sur plusieurs stations. Jean-Marc est syndiqué. Il me fait marrer. Il prétend en permanence qu’il faut faire bouger les choses pour que le monde change. Un révolutionnaire dans l’âme, ce Jean-Marc. Enfin, tant qu’on ne touche pas à ses propres avantages.
Plusieurs autres personnes gravitent autour de la station : les convoyeurs de fonds, qui viennent ramasser la recette, et les agents de sécurité qui patrouillent de temps en temps. La surveillance est pourtant omni­présente, sous la forme de deux caméras placées simultanément en face du guichet et de l’autre côté des tourniquets. Davantage pour identifier les fraudeurs que dans un réel souci de sécurité. N’oublions pas non plus les afficheurs, la personne chargée de réapprovisionner les distributeurs automatiques de boissons et friandises, et les contrôleurs, qui se déplacent toujours en bande, vêtus de leurs uniformes aux couleurs de l’entreprise. Des cow-boys du xxie siècle, mais très sympas, malgré les grands airs qu’ils se donnent.
Enfin, il y a les guichetiers. Firmin. Et Myriam, qui vient parfois faire des remplacements. Elle est mère célibataire, Myriam, avec quatre enfants à charge, de trois pères différents. Elle accepte tout, les horaires de nuit, les week-ends. Je crois qu’elle cumule deux emplois en plus de celui-là. Elle est discrète, on ne sait d’elle que ce qu’elle veut bien nous dire, à savoir pas grand-chose. Et surtout, elle ne se plaint jamais. Une vraie guerrière des temps modernes. Je crois qu’elle plaît à Mehdi. J’aime surprendre ses regards sur elle, et la façon dont il détourne timidement les yeux quand elle s’adresse à lui. Quant à Firmin, il la drague ouvertement, d’une manière si lourde qu’il n’a aucune chance. Je ne sais pas si Myriam a conscience de son pouvoir, je pense plutôt qu’elle est tellement dépassée par la vie qu’elle mène qu’elle ne se rend pas compte de ce qui l’entoure.

Et puis il y a moi, Nicolas, guichetier à la station Luxembourg. J’observe ce petit monde nouveau pour moi. Un univers dans lequel j’évolue doucement, à pas feutrés. De peur qu’on me démasque. Car chut ! ne le dites à personne : je suis un imposteur.
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