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Citation de Charybde2


Des récits inopérants
Les « récits inopérants » sont, pour moi, ces récits qui mobilisent des éléments et motifs qui ne permettent pas d’ouvrir de nouvelles possibilités, même imaginaires, pour le futur.
Je m’intéresse au contenu de ces histoires, mais aussi, comme à chaque fois, aux circonstances de leur création, qu’il s’agisse des motivations des auteurices, des sujets traités ou des desseins de leurs commanditaires.
Ces récits types, en science-fiction, font usage de termes qui ne sont plus vraiment questionnés : vaisseaux spatiaux, vitesse supraluminique, prescience, hyperespace, cyborg et téléchargement de l’esprit ; des techniques désormais plausibles aux yeux des lecteurices de science-fiction qui ne représentent plus les artifices qu’ils ont constitués à leur invention, pour les créateurices qui cherchaient simplement comment raconter leurs histoires.
Pourtant, il est possible de redonner vie à ces inventions en écrivant de nouvelles histoires qui ne les mettraient pas au centre.
Quand Becky Chambers reprend des éléments cent fois rebattus du space opera dans Apprendre si par bonheur, c’est pour mettre en scène des personnages hors-norme et proposer, dans un détournement magistral, une autre science-fiction. Le Merian, vaisseau d’exploration, part en exépdition, non pour coloniser ou exploiter, mais pour apprendre et découvrir, dans un souci constant de préserver les écosystèmes des lieux visités.
Quand Saul Pandelakis raconte la fin des humains sur terre et l’épopée d’un vaisseau de terraformation, c’est pour mieux partager avec ses lecteurices le quotidien et les questionnements d’un développeur humain dépressif et d’une chercheuse bot un peu perdue, tous deux transgenres.
Hélas, l’essentiel de la production, loin d’être aussi créatif, sert toujours le même plat, sans relief, sans assaisonnement. Des histoires vues et revues qui rappellent d’autres histoires, elles-mêmes inspirées de récits du siècle passé ; des personnages, toujours les mêmes, masculins, blancs, hétérosexuels, en bonne santé ; des problèmes dont les éventuelles solutions ne seraient que technologiques et compatibles avec le capitalisme et ses valeurs.
Ainsi, la téléportation, que l’on ne désigne pas par sa moins alléchante description « désintégration-reconstruction », serait le remède à bien des maux, mais à quel prix ?
Les robots et machines pensantes seraient voués à devenir nos ennemis, de la même façon que les esclaves étaient capables de se révolter face à la domination de leurs maîtres.
La rencontre d’une intelligence extraterrestre ne serait qu’un motif inévitable de guerre.
L’effondrement serait celui de la civilisation occidentale, inimaginable, alors qu’elle s’est construite sur les restes d’autres cultures qu’elle a pillées. […]
Ils sont si présents dans nos imaginaires et nos modes de pensée qu’ils ne sauraient plus constituer une alternative.
Ils sont un volet du récit dominant, n’attendant que d’être challengés par de nouveaux récits.
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