J’ai adoré cet excellent recueil de nouvelles tout d’abord pour son style : l’écriture est fluide, précise et extrêmement poétique. Les références culturelles qui émaillent le texte en font une ode à l’écriture, à la littérature, à l'Art en général, à ce qui nous rend meilleurs.
La thématique de la transformation, alors que la narratrice vivait un deuil, est très puissante et permet, à l’aune des Métamorphoses d’Ovide, de plonger le lecteur dans un monde surréel, magique, onirique tout en le faisant réfléchir sur sa propre vie.
Ce recueil est avant tout composé de destins fascinants, d’histoires magnifiques, dont les intrigues nous touchent car certaines nous parlent à tous, forcément.
Tout dans ces nouvelles est symbolique, tout est riche de liens, de résonnances et de réflexions sur sa propre existence, sur l’expérience de la Vie.
Dès le début du récit, j’ai été plongée dans un univers qui m’a transportée : celui des confidences de la narratrice qui partage avec le lecteur les destins de différents personnages forts et fragiles à la fois. Elle nous livre leurs métamorphoses en s’appuyant systématiquement sur les mythes et la littérature.
« Comme ses yeux étaient devenus trop faibles, je lisais Les Métamorphoses d’Ovide à voix haute pour elle. C’était son livre favori. Rares sont les changements heureux dans ces récits ; quand les êtres changent de forme, c’est qu’un Dieu veut les séduire ou les punir, rarement les aider. Et s’il existait malgré tout des métamorphoses heureuses ? »
« […] j’ai cherché des histoires qui racontent les métamorphoses des êtres en des formes meilleures : quand, au-delà de nos peines, nous devenons l’épanouissement d’une fleur, l’extraction de la chrysalide, l’explosion d’un orage jusqu’à la percée du jour. Quand vivre un drame nous donne la chance de renaître
Pour faire de la douleur une aurore nouvelle. »
Chacune des nouvelles qui suivent ce texte ont une résonnance particulière :
Ouroboros ou le cercle de l’enfance nous rappelle que l’une de nos métamorphoses est ce rite de passage de l’enfance à l’âge adulte :
L’ouroboros est un dessin ou un objet représentant un serpent ou un dragon qui se mord la queue. En alchimie gréco-égyptienne, il représente un sceau purificateur et symbolise l'éternelle unité de toutes choses, incarnant le cycle de la vie (naissance) et la mort. D’ailleurs le feu est un élément essentiel de l’alchimie et nous ramène à la symbolique de cette nouvelle.
Le titre et ce symbole offrent l’une des clés de ce texte superbe et mystérieux à la fois. L’opposition de la blancheur de la page et de l’encre, du noir, opère un subtil mélange de sensations et représente une métonymie, le blanc et le noir remplaçant les peurs et la croyance en un monde meilleur, plus pur. Cette nouvelle est sûrement la plus forte et la plus poétique que j’aie lue sur le rite de passage.
Quand Athéna parle à nos entrailles est une ode à l’enseignement, à la littérature et à sa compréhension. Comment lire ? Comment comprendre réellement ce qu’un auteur veut nous dire ? Eh bien, l’enseignante de cette nouvelle l’a compris et tente de le partager avec des adolescents, qui par ailleurs vivent pour certains dans la misère sociale et culturelle. Et ce cours sera un déclic pour la narratrice qui découvre tout un monde de poésie, à partir de la nature. Ainsi elle s’approprie la poésie et même une figure de style, la synesthésie, à travers sa relation à la terre.
« Regardez par-là. Il y a des choses qui en valent la peine. Il y a des poèmes. »
« La nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers. » (Baudelaire)
Que ressentez-vous ? […]
- Vos entrailles, ça doit venir de là ! Si vous ne descendez pas dans votre ventre, ne dîtes rien ! […]
- L’arbre a des racines pour se planter dans la terre, précisa Mme Létain à propos du poème. Comme les humains penchés sur leurs travaux quotidiens. Et ses branches sont tendues vers le ciel. Comme cet arbre, nous sommes déchirés entre deux mondes, conclut-elle. La terre et le ciel.
Toutes les nouvelles, d’une sensibilité extrême, nous émerveillent et nous touchent. J’ai apprécié en particulier Eros ouvre nos yeux, qui nous offre une histoire touchante et étonnante sur l’amour, l’Art, les échanges, les voyages.
Ce recueil est un véritable coup de cœur qui redonne espoir, l’espor que tous nous pouvons changer, nous transformer, nous métamorphoser, quels que soient nos problèmes, nos besoins !
A mettre entre toutes les mains !
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