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Citation de HundredDreams



17 h 00-18 h 00

Par où commencer ? 
Commençons par là. 
C’était pendant la canicule, le jour de la fête du dragon, le six du sixième mois du calendrier lunaire, il faisait si chaud que la terre sentait craquer ses os et, sur sa peau, les poils devenus poussière. Sur les arbres racornis, les fleurs fanaient, les fruits tombaient. En suspens dans les airs, les chenilles se momifiaient. 
Sur la route, les pneus des voitures éclataient, on les voyait dévier de leur trajectoire. On ne recourait déjà presque plus aux bêtes de somme, les paysans conduisaient des tracteurs, les plus riches avaient des voitures. Lorsqu’éclatait un pneu au bord d’un champ, une camionnette déglinguée venait à la remorque. Les tracteurs exhalaient une odeur de peinture rouge. Parfois surgissait une charrette tirée par un cheval ou un bœuf. Mais en grande majorité les paysans comptaient sur leurs propres forces et portaient sur leurs épaules, avec une palanche, le blé mis en bottes. Les champs les engloutissaient tous, tel un immense serpent ; la route était bouchée, les disputes allaient bon train. On en venait parfois aux mains. Un homme mourut ainsi lors d’une rixe. Peut-être plusieurs. 
Cette nuit-là, la nuit de la fête du dragon, des hommes périrent à cause de la chaleur. Chez nous, dans notre boutique du Nouveau Monde, toutes les robes mortuaires furent vendues. Nos marchandises d’occasion, notre collection d’objets funéraires, ceux même qui, remisés dans l’armoire, étaient mités, tout fut emporté. Les couronnes de fleurs, le papier-monnaie, les figurines, chevaux, chars et autres articles de papier découpé et coloré d’or, d’argent, de jade… 
Quelques jours auparavant, en entrant dans notre boutique – cette boutique funéraire à l’enseigne du Nouveau Monde –, vous auriez été choqués de voir quelle somptueuse abondance de marchandises s’y trouvait. Mais il n’y a plus rien à présent. Le soir de la fête du dragon, notre commerce a connu son apogée. En un clin d’œil, tout a été vendu. Exactement comme lorsqu’on annonce une brutale inflation des prix et que les gens se précipitent à la banque pour retirer leurs sous. La banque a été vidée jusqu’à la moindre coupure, même obsolète. Dans la rue, les magasins ont été totalement dévalisés, il ne reste plus rien.

(Début du Livre 1)
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