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Citation de Apoapo


5. « Moins de dix ans après la mort de Palante, années pendant lesquelles je n'avais pas cessé un jour de penser à lui, d'apprendre sur lui bien des choses qui me venaient des bavardages des gens rencontrés dans la rue, que je ne crois pas avoir jamais sollicités mais que j'écoutais patiemment, je me disais que j'allais devoir bientôt tenter de m'expliquer à moi-même une certaine obsession dont j'étais pris. Nous étions en 1933. Au début de l'année, le Reichstag avait brûlé. Les hitlériens fourraient dans des camps dont nous entendions parler pour la première fois des centaines et des milliers de gens qu'ils allaient torturer en attendant de les faire mourir. Les chômeurs se comptaient par millions en Amérique, et par millions en France, en Angleterre, en Allemagne, mais en Allemagne ils devaient bientôt rejoindre les formations hitlériennes. En Angleterre et en France ils parcouraient les routes allant vers Londres et vers Paris en brandissant de larges panneaux sur lesquels s'inscrivaient leurs revendications : du travail et du pain. On les recevait à coups de matraque. Et pendant ce temps-là au Brésil on jetait le café à la mer tandis qu'aux États-Unis et au Canada on chauffait les locomotives avec du blé.
Le moment n'était pas encore venu de me mettre à mon ouvrage, mais je savais qu'il allait venir et que le premier pas que je ferais répondrait de tous les pas suivants.
Un matin, dans un grand jardin près de Toulouse, à Mauzac, à quelques pas de ce qui allait devenir un peu plus tard le camp de concentration de Gurs, je me mis à écrire "quelque chose" et je compris que désormais je n'allais plus cesser. Je n'avais pas le choix. La question du scrupule n'existait pas plus que celle de savoir si la littérature est malhonnête ou non, je ne me posais pas ces questions, je ne me posais que celle des moyens. Je voyais les choses. Comment les montrer ? » (pp. 349-350)
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