Comme ils continuaient leur route pour se rendre à la ville
impériale, ils rencontrèrent un conducteur de chameaux, qui en
avait perdu un ; il leur demanda s’ils ne l’avaient pas vu par
hasard. Ces jeunes princes, qui avaient remarqué dans le chemin
les pas d’un semblable animal, lui dirent qu’ils l’avaient rencontré,
et afin qu’il n’en doutât point, l’aîné des trois princes lui demanda si
le chameau n’était pas borgne ; le second, interrompant, lui dit :
« Ne lui manque-t-il pas une dent ? »
Et le cadet ajouta :
« Ne serait-il pas boiteux ? »
Le conducteur assura que tout cela était véritable.
« C’est donc votre chameau, continuèrent-ils, que nous avons
trouvé et que nous avons laissé bien loin derrière nous. »
Dans cette résolution, je laisse à votre conduite le gouvernement de mes États, et j’espère que vous en userez toujours bien. Cependant, avant que de vous quitter, j’ai plusieurs choses de conséquence à vous recommander. La première, et la plus considérable, est d’avoir toujours la crainte des dieux dans le coeur ; la seconde, de regarder vos frères comme vos enfants ; la troisième, de secourir les pauvres ; la quatrième, d’honorer les vieillards ; la cinquième, de protéger l’innocence persécutée ; la sixième, de punir les coupables ; et la dernière, de procurer à vos peuples la paix et l’abondance.
DANS LES TEMPS HEUREUX où les rois étaient philosophes et s’envoyaient les uns aux autres des questions impor- tantes pour les résoudre, il y avait en Orient un puissant
monarque, nommé Giafer, qui régnait au pays de Serendip. Ce prince avait trois enfants mâles, également beaux et bien faits, qui promettaient beaucoup. Comme il les aimait avec une extrême tendresse, il voulut leur faire apprendre toutes les sciences néces- saires, afin de les rendre dignes de lui succéder à ses États. Dans ce dessein, il fit chercher les plus habiles gens de son siècle pour leur servir de précepteurs.