Lucilla Conigliello

l'expédient consistant à corriger des détails de ses propres dessins ou à essayer des variantes en superposant à l'original de petits morceaux de papier, souvent collés sur un seul côté, qui dévoilent à l'improviste le sujet primitif, est caractéristique de Jacopo, et dans les dessins et les gravures de la Verna, il tirera du procédé un dessin particulier: là l'idée des ajouts de papier devient un élément fonctionnel de la description progressivement du pèlerinage dans l'espace et dans le temps.

Le gout du grotesque se décline tout au long de la féconde carrière d'illustrateur scientifique de Ligozzi: squelettes humains et animaux fantastiques, souvent décharnés, ceints de couronnes et de guirlandes, étreigne des adolescents, des chérubins et de petits enfants, soulignant la vanité de la richesse et du pouvoir que résume la devise " SIC TRANSIT GLORIA MUNDI".

La vision de Jacopo n'a rien d'aseptisé. Ses représentations extrêmement fidèles des détails de la nature et des objets sont parfaites, mais uniquement en vertu de sa discipline, de son étude de la calligraphie, de sa maitrise des instruments techniques et de son talent d'enlumineur. Ses œuvres ne sont en aucun cas impersonnelle.

Il dessine des broderies , des tentures de lits, des caparaçons, des lampes, des candélabres, des blasons et des emblèmes, des écussons pour des carrosses, des meubles, des manches de couteau, il décore des plumets pour des harnais de chevaux, des coquillages et même une lunette astronomique pour Galilée.

Le gout a évolué et dans ses toiles religieuses, l'artiste se rallie à la recherche de critères précis d'illustration conformément aux prescriptions de la contre réforme: c'est le moment d'un nouveau naturalisme marqué de néo-purisme, qui revient à la tradition figurative du tout début du XVIème siècle.

C'est dans sa production graphique que s'exprime la veine la plus authentique et cohérente de la vocation de Jacopo, qui est né dessinateur, dessinateur de projets si précieux qu'ils en deviennent, tant pour lui que pour ses commanditaires, des œuvres d'art en elles-mêmes, et voulu comme telle.

Cet artiste originaire de Vérone, qui par tradition familiale puisa son inspiration dans l'art au delà des Alpes, se fit l'interprète et le propagateur des plus récentes manifestations du faste aulique du maniérisme international tardif, alors empreint de l'inquiétude de la contre réforme.

Comme dessinateur il signe à la manière nordique, ayant recours, tant pour les tableaux que pour les dessins, au monogramme d'inspiration nettement catholique formé des lettres J et L unies en leur centre par une barre sur laquelle se dresse une croix latine.

Il est clair que cet artiste est un homme du maniérisme international tardif, dans ses manifestations les plus raffinées et les plus controversées. Il est aussi le dévot tourmenté de la Contre-Réforme, obsédé par la notion de pêché et la pensée de la mort.

Dans sa peinture, l'enracinement maniériste ne cesse de s'atténuer petit à petit, en particulier à partir des années 15909, à cause de son départ de la cour et de ses débuts dans la production de tableaux d'autels réalisés dans un atelier autonome.