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Critiques de M. Nokomis (2)
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Malpertuis VI

Pour la sixième année, Malpertuis, spécialiste de la littérature fantastique, propose sa sélection de nouvelles athématiques mais toujours portées vers un imaginaire bizarre et quelque peu angoissant. Parmi les éditeurs français qui publient des anthologies, Malpertuis est l’un des rares à lancer chaque année des appels à textes libres.

On ne sait pas toujours très exactement à quoi se préparer en voyageant d’une histoire à l’autre, mais il est certain que le lecteur est amené à découvrir plusieurs auteurs très présents sur la scène SFFFH francophone. J’y figure cette fois-ci avec Scène de chasse ordinaire mais cet article sera surtout l’occasion de parler de mes camarades.



Vingt-deux auteurs ! Cela fait du monde, assez pour avoir des coups de cœur, et des impressions plus mitigées sur certains titres. Même si le genre de prédilection de Malpertuis est le fantastique, plusieurs textes ont des tendances SF. On reconnaît parfois des nouvelles très certainement écrites pour correspondre à d’autres appels à textes mais, loin de trouver cela gênant, j’ai au contraire pu en profiter pour voir des exercices de style qui participent à la diversité de l’anthologie.

Je ne vais pas vous faire un résumé de chaque nouvelle, mais une sélection des dix qui ont le mieux retenu mon attention. Oui, c’est une liste cruelle, mais cela ne signifie pas pour autant que les textes non cités ne sont pas bons, au contraire, le choix n’est pas simple à faire. Dans l’ordre chronologique, voici ce que nous pouvons trouver :



Ouverture courte et efficace, 3 kilogrammes de Sylas nous fait suivre une femme célibataire qui, grâce à un narrateur mystérieux, a enfanté sans père. Une histoire bien sombre qui fera aisément passer l’envie d’avoir un « autre soi » pour combler le vide de son existence.



L’imbricorioniste d’Elisa M. Poggio est certainement le texte le plus sf de l’anthologie. C’est aussi une plongée dans un monde aussi fascinant que terrifiant, où il devient possible d’obtenir un bilan de sa propre vie grâce à des observateurs qui connaissent tous nos gestes. La nouvelle soulève des questions très intéressantes en montrant toute la distance qui peut exister entre les actes d’une personne, ses raisons profondes, et les fausses intentions que l’on peut tirer d’un simple résumé des faits. La nouvelle peine un peu à trouver une fin, mais vaut largement le détour pour ses qualités introspectives.



Avec un titre comme Le dernier jouir du condamné, je soupçonne Bruno Pochesci d’avoir construit sa nouvelle pour parodier le célèbre texte d’Hugo. Une sorte de délire érotico-morbide étrange, où un condamné en pince pour son avocate, et une chute qui laisse sans voix. La fin est assez consternant mais, en même temps, elle ne se laisse pas oublier.



On continue dans la parodie avec Lloupa rouge. Eric Vial-Bonacci s’attaque au conte du Petite Chaperon rouge. C’est une jeune fille moderne, et elle a peur de sa grand-mère qui la maltraite. Mais où est le loup ? Il faudra le lire pour obtenir la réponse.



Dette de sang rend un bel hommage à la littérature fantastique du XIXe siècle. Thierry Jandrok situe son histoire dans un asile de Bucareste pendant la seconde guerre mondiale. Tout ce qu’il faut pour poser une ambiance sinistre d’emblée est là. On progresse comme dans une enquête pour éclaircir le mystère des patients zoophages qui se montrent curieusement lucides et en meilleure forme que les autres…



Sans terminus d’Anthony Boulanger m’a rappelé un petit appel à textes où la situation initiale était imposée. J’ai été heureuse de lire un nouveau texte de cet auteur, qui avait déjà retenu mon attention dans l’anthologie L’homme de demain des Artistes fous associés. Un esprit plein de rancœur revit en boucle le jour où il est tombé sur les rails d’un train à cause de la foule. L’auteur nous propose un petit texte qui rappelle que, dans la panique, les faits ne sont pas toujours ceux que l’on croit.



Emilie Querbalec est aussi une habituée des Artistes fous associés et des anthologies en général. L’auteur à suivre développe surtout des mondes et hantises intérieurs. Lisse le cordon est le texte le plus sombre que j’ai pu lire d’elle. J’aime particulièrement le titre. Un texte sur les passions parfois très vives de l’adolescence qui ne sont pas toujours durables des deux côtés, notamment quand elles impliquent deux jeunes filles.



Cherchez l’intrus mérite bien sa place tant il est délirant. Sur une dizaine de pages, Guillaume Suzanne livre un dialogue complètement échevelé entre un groupe de zombies. Un humain se ferait passer pour l’un d’entre eux et risque de les contaminer, qui est ce traître ?



Les textes délirants se poursuivent avec Le chant de la harpie, le soir au fond des bois d’Yves Daniel-Crouzet. Un démon grincheux s’improvise narrateur pour nous raconter comment il a été invoqué par une femme qui voulait faire assassiner son mari en lui donnant la peur de sa vie. Hélas, il semble qu’il faudra plus qu’un simple « bouh ! » pour impressionner l’époux.



L’anthologie se termine sur une note moins burlesque et plus réaliste. Avec Externalisé, Dominique Lémuri ne nous donne pas forcément à rire. Elle propose au contraire un texte très documenté sur les conditions de travail d’immigrés indiens, retenus dans des bureaux où ils recopient des rapports à la chaîne toute la journée. L’ajout du fantastique dans un contexte déjà bien glauque aggrave considérablement la situation du narrateur qui se retrouve confrontés à plusieurs phénomènes étranges, un rapport illisible, un balayeur à ne jamais regarder dans les yeux…
Lien : http://unityeiden.fr/antholo..
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Frontières

« Tout bien considéré, Il n’est vraiment question que de frontières, dans la science-fiction, le fantastique, la fantasy, et tous leurs cousins et descendants », annonce l’anthologiste Simon Bréan (maître de conférences en littérature française à l’université Paris-Sorbonne et spécialiste de la littérature de science-fiction) en préambule de cette anthologie.

Pour preuve, les treize nouvelles proposées sont autant de manières d’aborder les frontières dans des univers fantastiques, d’anticipation, post-apocalyptiques ou médiévaux. L’ensemble est d’un très bon niveau d’écriture et couvre différents genres de l’imaginaire. Preuve est à nouveau faite que la qualité narrative des auteurs de l’imaginaire n’a rien à envier à la littérature dite blanche. Voici six textes qui m’ont plus particulièrement accroché.

Un dessin ouvre chaque nouvelle, et je crois qu’ils permettent de les catégoriser en trois thèmes : le sextant pour de nouveaux horizons (au-delà des frontières ?), le globe terrestre pour les textes plus proche de fantasy (les dimensions parallèles ?), et le satellite pour la science-fiction.



Sujet 0 (de Azarian et Yohann Denuault)– Post-Apocalypse : voici un monde dans lequel non seulement la population de la surface est ravagée par un virus, mais de plus les rares survivants sont la proie de Machinas : ces créatures d’acier les traquent pour les enlever (ou les éliminer ?). Tych, une femme qui, étonnement, a survécu plusieurs années malgré son infirmité (elle est aveugle), se retrouve prisonnière d’un monde souterrain étrangement sophistiqué.

J’aborde toujours un texte post-apo avec prudence, car comme tous les genres surexploités (je pense aussi au vampirisme et aux Thriller policiers), il est difficile pour un auteur d’apporter « du neuf », car de nombreuses références approchantes peuvent prendre le dessus. Les auteurs (il s’agit d’un texte écrit « à 4 mains ») tirent cependant très bien leur épingle du jeu en traitant d’une frontière entre surface et souterrains, et grâce au personnage de Tych, à la fois novateur et attachant.



Garde-Frontière (de Stéphanie Courteille) : il n’existe pas de frontière sans gardien. On suit ici le quotidien et les réflexions d’un garde-frontière dès sa prise de fonction. Il tient seul un poste frontière et ne tarde pas à outrepasser sa fonction en laissant passer une émigrante « énigmatique ». Mais un jour, le nombre de migrant va considérablement augmenter et l'inciter à choisir. Un texte à relire plusieurs fois (avec plaisir) pour mieux le savourer.



La Crique (de Xavier-Marc Fleury) – Anticipation : Une cité située près de l’océan a mis en place une frontière infranchissable afin d’interdire l’afflux de migrants. Courants marins violents, rivages transformés en noman’s land, systèmes de détection sophistiqués… Mais un trio de jeunes insouciants brave ces interdits depuis des années afin de profiter de la liberté procurée par ce bord de mer déserté. Considéré comme un auteur « contre-humaniste », X.M. Fleury livre ici (une fois n’est pas coutume :) un texte qui se termine sur une note d’espoir.



Les roses de Novembre (d'Henri Bé) - Fantasy. Voici une histoire de gardien de porte. Si le dénouement laisse peu de surprise, le style d’écriture fluide, un poil romantique et empli d’humanité, et l’équilibre entre les descriptions, dialogues et introspection de la narratrice (qui reste malheureusement en retrait de l’histoire), font que le lecteur se laisse porter agréablement tout au long du récit, vers une fin frustrante, bien que très bien amenée.



Lucy(oles) in the sky (d'Anthony Boulanger) – Coutumier des anthologies, Anthony Boulanger a dû être publié par la majorité des revues et éditeurs qui proposent des anthologies, et c’est tout à fait justifié ! Un style sobre (ses textes sont généralement courts), une forte capacité à toujours poser un cadre original et crédible à la fois, (et réfléchi), des personnages bien caractérisés.. tout cela pour dire que c’est toujours un plaisir de découvrir un texte d’Anthony Boulanger. À part le clin d’œil du titre qui ne me semble pas très heureux, Lucyoles in the sky nous fait partir, en à peine douze pages, dans l’espace aux côtés de Véga.



Vertiges et frontières de la chair (de Jean-Louis Trudel) – la lecture de cette nouvelle m’a immédiatement donné envie de partir à la recherche d’autres textes de l’auteur ! Et j’ai eu le plaisir de découvrir que Jean-Louis Trudel a déjà écrit plusieurs nouvelles et romans. Ici, il prouve qu’aucune frontière ne peut rompre les liens entre des êtres chers, et surtout pas celle de la distance, (même lorsqu’on parle de distances interstellaires). Bon, dès qu’il y a de l’exploration spatiale, de l’humanisme et la découverte d’autres formes de vie, je m’emballe. Disons que cette nouvelle ne pouvait pas tomber mieux pour clore l’anthologie frontières et ouvrir sur de plus larges perspectives.



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